Les familles d’accueil et les services de santé sous pression

Camp de réfugiés à Mardan, en Nord-Ouest du Pakistan. Mai 2009.

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Les violences qui secouent la province de la frontière du Nord-Ouest du Pakistan (NWFP), ont poussé, selon les chiffres officiels, quelque 2,1 millions de personnes à fuir. Les déplacés, dans leur très grande majorité, ont trouvé refuge dans la région, principalement dans le district de Mardan, dans de petits camps improvisés ou chez l'habitant. La situation reste précaire pour les familles déplacées et pour les familles d'accueil.

En effet, l'accueil des nouveaux arrivants entraîne une forte pression sur les ressources de ces dernières. MSF apporte son soutien aux structures médicales locales pour les aider à faire face à l'augmentation des besoins. L'organisation apporte également une assistance matérielle aux familles vivant à l'intérieur et à l'extérieur des camps de déplacés officiels.
Selon les estimations, 80 % des deux millions de déplacés vivent hors des camps officiels. Ils ont été accueillis chez l'habitant ou ont improvisé des camps dans des écoles, des mosquées ou des bâtiments abandonnés mis à disposition par les communautés.

50 personnes dans une seule pièce

En plus des membres de leur propre famille, certains habitants hébergent jusqu'à 50 personnes déplacées dans une seule pièce. Les femmes et les enfants dorment généralement à l'intérieur et les hommes à l'extérieur ou bien ils dorment à tour de rôle.
« Les personnes déplacées qui vivent chez l'habitant ou dans des camps improvisés sont éparpillées dans toute la région. Nous ciblons des zones où il y a une forte concentration de familles déplacées car nous n'avons pas la capacité de couvrir l'ensemble les besoins partout », explique Eymeric Laurent-Gascoin, responsable terrain de MSF à Peshawar.
Les services de santé locaux sont soumis à une forte pression suite à l'afflux massif de déplacés. Les hôpitaux dans la région doivent faire face à un nombre croissant de patients relevant d'urgences médicales ou présentant des blessures de guerre. Certains des hôpitaux visités par MSF ont enregistré une hausse de 30 % à 100 % du nombre des admissions et des consultations.
MSF renforce actuellement la capacité des salles d'urgence, des services et des systèmes de référence des structures médicales à Mardan, dans le Lower Dir et à Makaland.
« Même si de plus en plus d'organisations apportent leur aide aux structures de santé primaire, la population a également besoin d'hôpitaux de référence fonctionnels avec des services d'urgence ouverts 24h/24 », affirme Fabien Schneider, chef de mission de MSF au Pakistan.

40 lits supplémentaires pour les blessés

À Mardan depuis le 4 juin, les équipes de MSF ont mis en place un service de 40 lits et interviennent dans la salle d'urgence du Centre médical de la ville. Au cours des dix premiers jours d'activité, 94 patients y ont été soignés. Et 21 d'entre eux étaient des blessés de guerre.
Dans le district de Mardan, MSF soutient également une salle d'urgence dans le Centre cComplexe médical rural de Takht Bhai et gère un système d'ambulances pour transférer les cas graves vers des hôpitaux de la région où MSF travaille.
Dans le Lower Dir, MSF apporte son soutien au service d'urgence de l'hôpital du district de Timurgara, où, en moyenne, 700 patients sont soignés chaque semaine dans la salle des urgences. Du 7 mai au 7 juin, 128 personnes présentant des blessures liées à la guerre y ont été hospitalisées. Parmi elles, des femmes et des enfants pour la plupart originaires de la vallée de Swat.
MSF apporte également son soutien aux services d'urgence de deux autres structures médicales (Sammer Bagh et Munda) du Lower Dir où 300 à 400 patients sont soignés chaque semaine.
Dans le district voisin de Makaland, MSF aide l'hôpital de Dargai (d'une capacité d'accueil de 40 lits) ainsi que sa salle d'urgence, son service obstétrique et son service de chirurgie. Les équipes chirurgicales de MSF réalisent 100 interventions chaque mois. Et 35 accouchements environ sont pratiqués chaque semaine.

«Une goutte dans l’océan»

« Nous sommes très limités par la situation sécuritaire », déplore Eymeric Laurent-Gascoin. « Idéalement, nous aurions plusieurs équipes médicales mobiles ainsi que des équipes dans les zones périphériques afin d'identifier les besoins, d'effectuer des distributions et de donner des consultations. Mais nous ne pouvons pas augmenter le nombre de nos équipes et nous déplacer librement dans la région dans un environnement sécuritaire aussi instable. Nous savons que les déplacés que nous voyons reçoivent une aide de bonne qualité mais cela n'est qu'une goutte dans l'océan au regard du nombre de personnes qui ont fui la guerre. »
Les risques d'épidémies s'accroissent lorsque la densité de population est plus forte, que les températures augmentent dans la région et que les habitants rencontrent des difficultés pour accéder aux soins primaires, notamment dans les zones rurales où il existe peu de centres médicaux fonctionnels.
Selon les estimations officielles, il y aurait 60 000 femmes enceintes parmi les deux millions de déplacés. Afin de faciliter l'accès aux soins primaires, MSF donne des consultations et dispense notamment des soins prénatals et materno-infantiles dans deux camps de déplacés et sur quatorze sites dans des zones où les personnes déplacées vivent chez l'habitant. Chaque semaine, entre 2 950 et 3 200 consultations sont données dans les districts de Mardan, du Lower Dir, de Peshawar, de Charsadda et de Manshera.

«Les déplacés ont besoin de parler»

« La gale, des infections respiratoires et des douleurs sur l'ensemble du corps sont les principaux problèmes médicaux rencontrés jusqu'à présent », explique Anja Braune, infirmière de MSF responsable des soins médicaux primaires dans les environs de Peshawar. « Les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables. Je vois tous les jours des patients qui ont besoin de soins médicaux. Mais par-dessus tout, il existe un grand besoin chez les personnes déplacées, notamment chez les femmes, de parler des traumatismes qu'elles ont subis lorsqu'elles ont fui les violences. »
MSF distribue également des biens de première nécessité, notamment des tentes, des matelas, des couvertures, des kits d'hygiène, et des ustensiles de cuisine aux familles déplacées à Mardan, Peshawar et dans le Lower Dir. En mai, plus de 2 000 kits de biens de première nécessité ont été distribués aux familles déplacées vivant dans des camps improvisés ou chez l'habitant. MSF gère également trois camps dans le Lower Dir et à Mardan, couvrant la plupart des besoins de base de plus de 11 000 personnes en termes d'abris, de biens de première nécessité, d'approvisionnement en eau et en équipements sanitaires.
Ailleurs dans le pays, MSF gère également des programmes médicaux au Balouchistan, dans la région du Kuram Agency et dans le district de Manshera.
Au Pakistan, MSF n'accepte aucun don provenant de gouvernement ou de bailleurs de fonds. MSF n'utilise que des dons privés provenant du grand public pour mener ses activités.