Dr Saleh, médecin irakien: «Nous devons continuer à travailler; qui le fera sinon?»
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Dr Saleh est médecin anesthésiste. Il travaillait dans un hôpital du gouvernorat de Tamim depuis 2010. Il y a quelques semaines, face à la recrudescence des violences en Irak, il s'est porté volontaire pour travailler dans un des rares hôpitaux encore fonctionnels de la province de Salah ed Din. Il décrit son travail au quotidien et la situation dans la région après que le gouvernement irakien a perdu son contrôle et que la plupart des médecins et infirmiers ont fui la région.
«La situation dans le gouvernorat de Salah ed Din est très mauvaise, en particulier à Tikrit. La ville et ses environs subissent des frappes aériennes depuis plusieurs semaines. En quelques heures, la situation a radicalement changé: les combattants étaient partout dans les rues… la ville était paralysée. Depuis plusieurs semaines, il n'y a pas de gaz ni d'électricité en ville et les banques ont été pillées. La plupart des gens ont fui et ceux qui restent ne sortent pas de chez eux en raison des bombardements et de l'insécurité. La population vit dans la peur, l’avenir est incertain.
Difficulté d’accès aux soins et pénuries
Les gens n'ont plus accès à la plupart des services. Les patients ne viennent plus à l’hôpital pour le traitement des maladies chroniques et ne viennent que pour des urgences vitales. Ils arrivent de toute la région, en utilisant leurs propres moyens de transport. Nous avons parfois reçu des personnes qui étaient décédées pendant le trajet.
La majorité du personnel médical a quitté la région. Auparavant il y avait environ 200 médecins et spécialistes dans la ville; il n'en reste que sept, tous bénévoles dans cet hôpital. Nous devons continuer à travailler; qui le fera sinon?
Dans le bloc où je travaille, nous sommes confrontés à de graves pénuries de médicaments essentiels et au manque de matériel chirurgical. Nous n'avons pas reçu d’approvisionnement dernièrement. C’est pour cette raison que j'ai contacté MSF et leur ai envoyé une liste des médicaments et d’équipement absolument essentiels.
Chirurgie de guerre
La plupart des cas urgents que nous traitons sont des traumatismes dus aux violences tels que des laparotomies thoraciques, des cas orthopédiques, mais aussi des césariennes, appendicites, ou abcès. En moyenne, nous effectuons 45 actes chirurgicaux par jour dont environ 15 sont liés à des blessures. Pour vous donner un exemple, lors de ma dernière garde, nous avons traité en une seule journée un total de 13 patients blessés. Le lendemain nous avons eu deux blessés, une laparotomie exploratrice et un cas orthopédique lié à un éclat d’obus dans le bras.
Nous ne sommes plus en mesure de mener des procédures électives. Nous devons également décharger les patients dès que possible. La plupart du temps nous les laissons quitter l'hôpital dès le deuxième ou troisième jour, car il n'y a pas de place pour les garder ni assez de personnel pour leur fournir des soins post-opératoires.
Ici, nous sommes sous pression. Nos conditions de travail sont extrêmement pénibles. Atteindre l'hôpital chaque jour est un défi qui met les nerfs à vif.»