Haïti: la violence met en péril les activités médicales de MSF
© Sandra Lamarque/MSF
Haïti3 min
Alors que la capitale haïtienne est confrontée à un nouveau pic de violence, Médecins Sans Frontières voit ses activités médicales lourdement impactées et prévient qu’il sera difficile de maintenir une continuité de soins tant que les affrontements armés et braquages continueront d’affecter ses structures, ambulances, patients et personnels médicaux.
La première semaine de juin, des affrontements dans le quartier de Martissant et d'autres districts de Port-au-Prince ont fait de nombreux blessés et provoqué le déplacement de plus de 1 000 personnes, dont des patients et membres du personnel de MSF. Entre le 2 et le 4 juin, le centre d'urgence de MSF à Martissant a reçu 42 blessés par balle, les cas les plus sévères ont ensuite été transférés à l'hôpital de traumatologie de MSF dans le quartier de Tabarre. En tout, sur cette même période, l’hôpital de Tabarre accueillait 42 patients dont 38 blessés par balle obligeant MSF à augmenter la capacité d’accueil de 50 à 68 lits.
Nous observons une détérioration extrêmement inquiétante de la situation sécuritaire
Une augmentation de la violence chronique
Des affrontements armés ont eu lieu près du centre d'urgence et des bureaux de MSF à Martissant, et le personnel médical a dû se protéger des éventuelles balles perdues. Des individus armés ont braqué deux chauffeurs d’ambulances MSF parmi d'autres véhicules en provenance de Martissant. « Pour protéger notre personnel, nous avons dû réduire nos activités communautaires, mais nous restons sur la prise en charge des urgences » explique Alessandra Giudiceandrea, cheffe de mission de MSF en Haïti.
Du 15 au 31 mai, alors que des affrontements ont eu lieu dans les quartiers de Cité Soleil et de Bel Air, l’hôpital de Tabarre avait déjà pris en charge 41 patients, 32 victimes de la violence, exerçant une pression sur les capacités d’hospitalisation de la structure. Dans un autre incident ayant eu lieu le 25 mai au soir, un membre du personnel de l'hôpital MSF de Tabarre était tué par balle alors qu'il sortait de sa journée de travail.
Cette augmentation de la violence chronique en Haïti s’inscrit dans une crise politique et économique plus profonde qui affecte la population de nombreuses façons. Le système de santé est non seulement mis à rude épreuve par l'insécurité mais aussi par l'augmentation actuelle des cas de Covid-19, le manque de financement et le niveau élevé des besoins médicaux.
Un impact sur les activités médicales
« Au moment où nous devrions pouvoir étendre nos activités en raison de la Covid-19 et d'autres besoins, nous nous battons pour garder au moins nos structures existantes ouvertes dans des conditions sécuritaires déplorables », a déclaré Giudiceandrea. « Nous demandons à tout le monde de respecter la nécessité de poursuivre les activités médicales. »
À Martissant, l’insécurité entrave les déplacements et la capacité des patients à accéder aux structures de santé. Bien qu’un afflux de patients graves ait été enregistré la semaine dernière suite aux pics de violence le nombre d’admissions est désormais en-dessous à la moyenne habituelle.
Le nombre de victimes de violences sexuelles prises en charge a également baissé, pouvant laisser penser que la population a peur de sortir pour se rendre dans les structures de prise en charge. Il s’agit là d’un élément supplémentaire d’inquiétude pour les équipes médicales de MSF, qui voient l’augmentation générale de la violence entraver encore plus l’accès aux soins pour les survivants de ces violences sexuelles.
MSF fournit des soins médicaux en Haïti depuis 30 ans, mais pour continuer à pouvoir offrir de tels services, MSF doit être en mesure d'assurer la sécurité des patients et du personnel médical dans leurs déplacements et au sein des structures de santé. MSF demande que les groupes et individus perpétrant des actes de violence en Haïti respectent la sécurité du personnel de santé, des patients, du matériel et des structures médicales ; les véhicules et ambulances doivent aussi pouvoir circuler en toute sécurité sans risquer d’être attaqués.
© Sandra Lamarque/MSF