Liban: l’assistance n’est pas à la hauteur des besoins croissants des réfugiés syriens
© Michael Goldfarb/MSF
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Une nouvelle enquête menée par MSF montre que la moitié des réfugiés ne reçoivent pas les soins médicaux nécessaires.
Une enquête publiée le 7 février 2013 par l’organisation médicale humanitaire internationale Médecins Sans Frontières (MSF) révèle que les Syriens fuyant leur pays en proie à la violence pour trouver refuge au Liban vivent dans des conditions extrêmement précaires et ne reçoivent pas une assistance humanitaire suffisante.
Le rapport de MSF «Survivre au delà de la zone de guerre» montre que parmi les 220 000 Syriens ayant trouvé refuge au Liban, beaucoup ne peuvent accéder aux soins de santé de base. L’enquête révèle une nette détérioration de la situation humanitaire au Liban en raison des délais d’enregistrement. Dans ce pays, où la majorité des réfugiés syriens ont trouvé refuge, l’assistance est en effet conditionnée à l’enregistrement.
«Dans une situation de crise, l’enregistrement ne doit pas être une condition pour recevoir une assistance», explique Bruno Jochum, le directeur général de MSF. «L’accès à l’aide humanitaire est sérieusement entravé par les difficultés que beaucoup de réfugiés rencontrent lors de leur enregistrement en arrivant au Liban. Le déploiement de l’aide doit être accéléré et étendu.»
Abris insuffisants pour l’hiver
Les réfugiés syriens et les autres populations déplacées au Liban n’ont pas accès à des soins de santé gratuits ni à des abris adéquats. Leurs conditions de vie sont de plus en plus précaires. Plus de 50% des personnes interrogées par MSF, enregistrées ou non, sont logées dans des abris de fortune comme des garages, des fermes, des immeubles en construction ou des écoles abandonnées. La plupart de ces lieux ne protègent pas ou très peu contre l’hiver. Ces conditions de vie déplorables contribuent à la détérioration de leurs conditions de santé.
L’enquête de MSF a été menée en décembre 2012 auprès de 2 100 familles syriennes réfugiées. 75% des personnes interrogées vivent dans des conditions qu’elles jugent totalement inacceptables au vu de la rigueur de l’hiver. Les personnes enregistrées auprès du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) bénéficient de nourriture, de coupons de carburant et d’une couverture partielle des soins de santé. Or plus de 40% des personnes interrogées ne sont pas enregistrées.
«Nous sommes dans une situation critique. Nous n’avons pas assez à manger et nous ne savons pas à qui nous adresser pour demander de l’aide. La seule nourriture que nous recevons vient de la solidarité de nos voisins libanais. En tant qu’adultes, nous pouvons nous réduire à un repas par jour mais pas nos enfants», raconte un père réfugié. «Si nous n’avions pas peur des bombardements, nous retournerions immédiatement à Homs.»
A la limite des capacités d’accueil
Environ une personne interrogée sur quatre déclare n’avoir reçu aucune assistance. Et 65% disent n’avoir reçu qu’une assistance partielle qui ne couvre pas les besoins de leur famille. Dans la plupart des régions du Liban, la capacité des communautés d’accueil à absorber les réfugiés a atteint ses limites. Les familles récemment arrivées manquent d’argent pour payer leur nourriture, le loyer pour un abri et n’ont pas d’accès aux soins de santé de base.
Les six derniers mois, la situation médicale de ces populations s’est clairement détériorée. Plus de la moitié des personnes interrogées (52%) ne peuvent s’offrir un traitement contre les maladies chroniques. Près d’un tiers ont été forcées à suspendre leur traitement parce qu’il était trop cher. Les vaccinations des enfants, les prescriptions de médicaments et les soins obstétriques et anténataux ainsi que les soins de santé de base sont tout simplement hors de portée.
«Il est temps que les bailleurs de fond s’engagent véritablement à répondre aux besoins grandissants des réfugiés au Liban. Les acteurs nationaux et internationaux doivent évaluer les méthodes et le niveau d’assistance déployés», déclare Bruno Jochum. «MSF appelle toutes les autorités et agences à accélérer la mise en place de centres de réception pour les nouveaux arrivants et à rendre immédiatement disponible des abris collectifs adaptés aux conditions hivernales afin de pouvoir face à l’afflux grandissant de réfugiés.»
Les activités de MSF en Syrie et dans les pays voisins
MSF a élargi ses activités au Liban avec l’arrivée de milliers de Syriens fuyant les violences dans leur pays depuis novembre 2011. En 2012, MSF a dispensé plus de 23 000 consultations dans la vallée de la Bekaa et à Tripoli. Depuis novembre 2012, MSF a distribué plus de 25 580 biens de première nécessité aux réfugiés syriens dans la vallée de la Bekaa. Mi-janvier 2013, MSF a commencé à distribuer des coupons de mazout aux réfugiés permettant à plus de 300 familles d’avoir accès à une source de chauffage pendant deux mois. Aujourd’hui, MSF a doublé ses ressources humaines passant de 50 employés à 112 et intensifie sa réponse opérationnelle.
En Syrie, des équipes de MSF travaillent dans trois hôpitaux situés dans le nord et le nord-ouest du pays, dans des zones contrôlées par des groupes armés de l’opposition. MSF y fournit des soins médicaux d’urgence, notamment une prise en charge chirurgicale. De fin juin 2012 à début janvier 2013, les équipes ont fourni plus de 11 000 consultations et réalisé plus de 1200 interventions chirurgicales.
Dans les pays limitrophes comme la Jordanie, le Liban ou l’Irak, les équipes MSF interviennent également auprès des réfugiés syriens par des programmes de soins médicaux et chirurgicaux.
© Michael Goldfarb/MSF