MSF renforce ses interventions contre la malnutrition dans la Corne de l’Afrique

La Corne de l'Afrique orientale connaît une des années les plus sèches depuis des décennies.

Somalie5 min

L'organisation espère pouvoir développer ses actions dans les territoires contrôlés par Al-Shabaab en Somalie.

L’annonce faite par l’une des principales factions armées en Somalie, Al Shabaab, que les organisations d’assistance étrangères seraient les bienvenues dans les territoires sous leur contrôle a suscité l’espoir d’une augmentation de l’assistance à l’intérieur du pays, selon MSF.
«MSF travaille en Somalie depuis plus de deux décennies et mène d’importants programmes médicaux, déclare Joe Belliveau, responsable opérationnel de MSF. Nous avons réussi à maintenir nos programmes dans les zones contrôlées par Al-Shabaab, mais les restrictions sur l’approvisionnement et le personnel d’assistance nous ont empêchés jusqu’ici d’accroître nos opérations. Nous espérons que la déclaration d’Al-Shabaab va conduire à une levée de ces restrictions.»
Les équipes de MSF interviennent dans divers lieux à l’intérieur de la Somalie. Elles fournissent également une assistance aux réfugiés épuisés traversant les frontières de la Somalie vers l’Ethiopie et le Kenya.
«La plupart de nos programmes nutritionnels thérapeutiques en Somalie dépassent leur capacité d'accueil avec déjà plus de 3 400 enfants actuellement admis dans nos programmes. Nous menons des projets nutritionnels dans plusieurs endroits dans la région du Lower Juba Valley, dans le Galgaduud, Mudug, dans le Lower Shabelle et dans les régions de Bay. Ces dernières semaines, nous avons constaté une forte augmentation des cas avec l’arrivée de personnes qui voyagent des centaines de kilomètres pour avoir accès aux soins de santé et au traitement pour leurs enfants souffrant de malnutrition», ajoute Joe Belliveau.

Une sécheresse exceptionnelle

Durant l’année écoulée, la Corne de l’Afrique orientale a connu deux mauvaises saisons des pluies consécutives, ce qui a eu pour conséquence que cette année est l’une des plus sèches depuis des décennies dans de nombreuses zones pastorales. L’impact de la sécheresse a été exacerbé par les prix élevés des céréales locales, l’excès de mortalité du bétail, les conflits et la restriction d’accès à l’aide humanitaire dans certaines zones. De grandes parties de la Somalie ont été ravagées par la guerre civile depuis plus de vingt ans et les personnes déplacées ont de grandes difficultés à accéder aux rares endroits où l’aide alimentaire et des soins de santé sont proposés.
Ader Mohammud, une jeune mère de 19 ans, a parcouru environ 250 kilomètres pour emmener son enfant affaibli au centre de traitement de MSF à Galcayo. Pour sa fille Najmo, âgée de 11 mois, le long voyage a été trop long et trop tardif. «Je ne pouvais pas supporter le coût du transport (200 000 SOS ~ 8 USD), je n’ai pas de soutien à Galcayo. Je survis seulement avec ce que les autres patients et soignants me donnent.» Ader ne sait pas comment elle va rentrer chez elle, elle pense que la vente de la ration de nourriture donnée à sa sortie du centre de soins sera la seule solution possible.
La situation est tout aussi dramatique dans d'autres régions en Somalie. «Dans la ville de Marere, dans le sud de la Somalie, nous avons noté une forte augmentation des cas de malnutrition sévère chez les personnes venant de la vallée du Juba», poursuit Joe Belliveau. «La majorité des lits d’hôpitaux à Marere sont actuellement occupés par des enfants malnutris ayant besoin de soins intensifs. Du personnel supplémentaire a dû être recruté.»

Au Kenya, le camp de Dadaab déborde

Pendant ce temps, des dizaines de milliers de Somaliens ont fui vers le Kenya et l’Ethiopie à la recherche d’aide. Le camp de réfugiés tentaculaire de Dadaab dans l’est du Kenya a connu une croissance rapide de nouveaux arrivants. Lors d’une évaluation à la périphérie de l’un des sites du camp de Dadaab, les équipes MSF ont trouvé des taux de malnutrition extrêmement élevés parmi les nouveaux arrivants: 37,7% de malnutrition aiguë globale et 17,5% de malnutrition aiguë sévère. En conséquence, MSF a admis 320 enfants dans son centre de nutrition thérapeutique pour le seul mois de juin - trois fois plus qu’à la même période l’an dernier. L’enquête a également révélé que 43,3% des enfants âgés de 5 à 10 ans souffraient de malnutrition.
En outre, MSF est très préoccupée par les retards dans l’aide fournie aux réfugiés nouvellement arrivés. Depuis le 30 juin, les réfugiés reçoivent de la nourriture pour 15 jours à leur arrivée, mais doivent attendre 40 jours pour la seconde distribution. «Les familles qui arrivent à Dadaab cherchent un refuge et il est inacceptable qu’elles doivent attendre aussi longtemps l’aide la plus basique, de la nourriture et de l’eau», note Emilie Castaigner, chef de mission MSF au Kenya.
A Dolo Ado, dans le sud-est de l’Ethiopie (zone de Liben, région somali), 400 réfugiés traversent la frontière chaque jour. 2 700 l’on fait pour la seule journée du 28 juin. Dolo Ado accueille déjà près de 100 000 réfugiés dans des camps conçus à l’origine pour 45 000 personnes. Lors de leur arrivée en Ethiopie dans le camp de transit, avant d’atteindre les camps où ils sont réaffectés, 37% des enfants de moins de cinq ans examinés par MSF étaient malnutris. MSF traite actuellement plus de 6 800 enfants dans ses programmes nutritionnels.
«MSF augmente sa capacité d’accueil dans ces camps, mais nos limites opérationnelles sont atteintes», explique Alfonso Verdú, chef des opérations de MSF en Ethiopie. «L’engagement d’autres organisations pour lutter contre la crise nutritionnelle est essentiel. Et les organisations qui sont déjà présentes doivent prendre leurs responsabilités afin d’éviter la mort de nombreuses personnes vulnérables.»

Les activités de MSF en Somalie

MSF travaille en permanence en Somalie depuis 1991 et fournit actuellement des soins médicaux gratuits dans huit régions du sud de la Somalie. Plus de 1 300 employés somaliens, soutenus par environ 100 personnes à Nairobi, fournissent gratuitement des soins de santé primaire, traitent la malnutrition, pratiquent des interventions chirurgicales, distribuent de l’eau et du matériel de secours. MSF n’accepte aucun financement du gouvernement pour ses projets en Somalie qui sont financés par ses donateurs privés.