Niger: Vacciner contre la méningite, mais aussi soigner les patients.

Niger

5 min

Même si l’épidémie de méningite qui frappe la région de Zinder au Niger depuis la fin de l’année passée, donne quelques signes de recul, le nombre de personnes atteintes par la maladie reste important. Or sans traitement, la méningite reste mortelle dans plus de la moitié des cas. Dans le district de Magaria où MSF vient de commencer la vaccination pour près de 500 000 personnes, les équipes médicales mobiles de MSF veillent à ce que les personnes atteintes reçoivent à temps les médicaments. Claude Mahoudeau nous raconte leur travail, une activité moins spectaculaire que la vaccination mais primordiale dans l’intervention.

Village de Yékoua, près de Magaria. 6 avril 2009 - Les deux salles proches du centre de santé du village ont tout juste été nettoyées par l’équipe logistique MSF pour recevoir d’éventuels patients, lorsque l’infirmière, Madame Souéba, nous rejoint : « Une malade vient d’arriver et je lui ai donné le traitement », nous informe t-elle. « C’est le second cas de méningite depuis ce matin. Heureusement que l’on a reçu ce nouveau médicament –la Ceftriaxone. Il est très efficace. Cela me tranquillise pour tous mes patients. »
De fait, la distribution de ces traitements et la formation du personnel à son utilisation sont des activités capitales. « C’est ce qui sauve les vies », insiste Nico Heijenberg, le médecin MSF responsable de l’intervention à Magaria pendant le briefing des nouveaux arrivés de l’équipe. « Les gens ne voient que la vaccination. Il est vrai que c’est elle qui permettra de “casser” le développement de l’épidémie. Mais sans cette prise en charge médicale en urgence des patients atteints de méningite, ce serait une catastrophe en terme de vies perdues. »
Un homme portant dans ses bras une jeune fille paraissant inconsciente descend prudemment les marches du centre de santé. Il allonge la malade, toujours inconsciente, sur une natte sous un auvent. La chaleur est insupportable, plus de 40° à l’ombre, et la poussière pénètre partout. C’est cette poussière qui irrite les muqueuses de la gorge et ouvre la porte aux méningocoques responsables de la maladie. « Je suis son instituteur », nous dit l’homme, tout en humectant le front de la jeune fille qui ne réagit pas. « Hier, elle n’avait rien et ce matin elle était comateuse. Nous arrivons de Toubé, un village à 14 kilomètres d’ici et la route a été longue.»

Ici les gens connaissent bien le chankarow, la méningite

Le village de Toubé, nous l’apprendrons ensuite, n’a pas été approvisionné en médicaments contre la méningite par l’équipe MSF. Il ne dispose en effet pas d’un centre de santé, le préalable indispensable pour pouvoir administrer ces médicaments injectables. Dans ces zones rurales, il est fréquent pour les villageois de devoir marcher bien plus de cinq kilomètres pour trouver une clinique, ce qui limite pour beaucoup l’accès à des soins corrects. Heureusement, à Toubé, le père de la jeune fille étant parti travailler au Nigeria, les villageois se sont immédiatement organisés pour amener la jeune fille malade. Ici les gens connaissent bien le chankarow - méningite en langue Haoussa - qui désigne celui qui ne peut pas bouger la tête. Un signe qui ne trompe pas.
A Yékoua, village à une bonne heure de piste à l’ouest de Magaria, la ville principale du district, l’une des deux équipes MSF chargées de la prise en charge médicale était passée quelques jours auparavant pour vérifier s’il y avait des malades, pour relever les informations sur les personnes déjà prises en charge et laisser des médicaments. Aujourd’hui, le nombre des personnes touchées par la maladie devenant important, Madame Souéba aimerait bien revoir au plus vite l’équipe MSF et son docteur itinérant. Promesse est faite par l’équipe logistique de faire remonter l’information le soir même à Magaria. Avec un peu de chance, l’une des deux équipes qui se partagent la responsabilité de suivre les quatorze centres de santé du district a peut-être planifié un passage vers l’ouest de Magaria. De son coté, Madame Souéba ne juge pas nécessaire aujourd’hui de référer l’un de ses petits patients vers l’hôpital de Magaria. Nous quittons Yékoua alors que le soleil est déjà bas.

Chercher les personnes atteintes jusque dans les villages

Le lendemain, trois équipes vont vacciner à Yékoua, où 5 000 personnes sont attendues. Dès l’aube, l’équipe de prise en charge médicale du docteur Simon se met en route. Elle fait un petit détour par le centre de santé de la ville de Magaria. Un jeune enfant peul a été amené pendant la nuit, inconscient. La ponction lombaire a déjà été faite par l’agent de garde et le traitement administré. Il est encore très tôt quand nous partons vers Yékoua. Au centre de santé, il ne reste que la jeune fille de Toubé et un autre enfant qui semble toujours souffrir de la nuque. « Les douleurs mettent parfois plusieurs jours à disparaître », indique Simon qui observe les deux jeunes patients et semble satisfait de leur évolution. « Maintenant nous allons aller visiter Toubé, le village d’où vient cette jeune fille. Il y a peut-être d’autres personnes atteintes. »
Après une bonne demi-heure de recherche, nous arrivons dans la petite bourgade déjà écrasée par la chaleur du petit matin. Le chef est là et accueille l’équipe MSF. Celle-ci visite la famille, interroge la maman qui est restée avec les sept frères et sœurs. Pas de signes d’autres personnes atteintes. L’équipe presse le rythme et repart vite car sa journée commence à peine. Elle a prévu de superviser quatre centres de santé aujourd’hui, sans compter d’éventuelles recherches de cas dans des villages reculés.
A Yékoua, à l’ombre des acacias, la file s’est formée pour la vaccination et au centre de santé, Madame Souéba est satisfaite. Elle a reçu de nouveaux traitements et sait qu’elle peut compter sur Simon, le médecin MSF.