Quatre choses à savoir sur les réfugiés sud-soudanais au Soudan

08 janvier 2020, Etat du Nil Blanc, Soudan

Soudan6 min

En décembre 2019, MSF a ouvert un nouvel hôpital de 85 lits dans l'État du Nil blanc, au Soudan, en améliorant les services existants afin de renforcer la qualité des soins de santé fournis aux réfugiés sud-soudanais et à la communauté locale. L'hôpital, situé dans le camp de réfugiés d'El Kachafa, fournit des soins de santé primaires et secondaires aux patients souffrant de maladies complexes, notamment les enfants souffrant de malnutrition sévère et les personnes atteintes de maladies infectieuses chroniques, comme le VIH et la tuberculose (TB).

1. Le Soudan continue d'accueillir un grand nombre de Sud-Soudanais

Environ 2,2 millions de Sud-Soudanais vivent actuellement déplacés de force dans les pays voisins après avoir fui la guerre civile. Aujourd'hui, selon le HCR, plus de 861 000 réfugiés sud-soudanais ont trouvé refuge au Soudan voisin, le deuxième en nombre après l'Ouganda.

En 2017, à cause de la guerre, je suis arrivé dans l’État du Nil Blanc avec 18 membres de ma famille. Il nous a fallu un mois pour atteindre le Soudan à pied. C'était difficile et certains de nos enfants sont décédés en chemin, à cause de l'exposition au soleil et parce qu’il n'y avait pas assez de nourriture et d'eau

Julia Odok, 24 ans, réfugiée sud-soudanaise de Malakal.

« Après la crise au Sud-Soudan, je me suis retrouvée réfugiée, avec ma famille. Tout a été détruit dans ma région [le Haut-Nil]. Nous avons tout perdu, y compris notre maison. Nous sommes venus ici sans rien, simplement avec nos vies. La communauté locale nous a accueillis chaleureusement » se souvient Lino Ernest, un médecin qui travaille avec MSF au Soudan depuis trois ans.

Presque tous les États soudanais qui bordent le Sud-Soudan comptent un nombre important de réfugiés. L'État du Nil blanc accueille 248 000 réfugiés, dont 162 000 vivent dans des camps comme El Kachafa. Malgré le processus de paix en cours au Sud-Soudan, il n'y a pas eu de diminution significative du nombre de réfugiés dans le Nil Blanc. Beaucoup espèrent retourner chez eux pour reprendre une vie normale, mais préfèrent pour l’instant rester au Soudan jusqu'à ce que la situation se calme.

2. Il y a des besoins humanitaires importants dans les camps

Les besoins sanitaires et humanitaires dans les camps de réfugiés demeurent élevés et il est crucial de continuer à aider les réfugiés et les communautés locales qui les accueillent. Les principaux défis dans les camps sont la disponibilité de l’eau potable, le manque de travail rémunéré, les restrictions de mouvement et l'insuffisance de nourriture.

08 janvier 2020, Etat du Nil Blanc, Soudan

L'assistante de laboratoire Asonta James prélève un échantillon de sang sur un enfant au nouvel hôpital de MSF dans le camp de réfugiés d'El Kachafa, dans l'État du Nil blanc au Soudan

© MSF/Musab Sahnon

Les équipes de promotion de la santé jouent un rôle important dans la communauté. « Nous allons à la recherche d'enfants mal nourris dans les camps et nous guidons les familles vers l'hôpital. Nous sensibilisons les gens à des maladies comme le choléra, la tuberculose, le VIH et le paludisme », explique Butrus Kwathi, superviseur en promotion de la santé. Les équipes visitent des lieux très fréquentés comme les églises, les mosquées, les écoles, les points d'eau et se déplacent également de maison en maison.

La vie est difficile. Nous n’avons rien : pas de maison, pas d’argent et pas de travail

Julia.

« La seule chose que vous pouvez faire est de vous asseoir et d’attendre. Nous recevons des lentilles et du sorgho tous les mois, mais rien d'autre. Nous ne pouvons pas manger des lentilles tous les jours. Cela rend les enfants vulnérables aux maladies ».

3. La plupart des maladies sont liées à de mauvaises conditions de vie

Les patients viennent à l'hôpital MSF depuis El Kachafa et huit autres camps voisins, ainsi que des villages environnants. La plupart des problèmes médicaux que les équipes MSF constatent dans l'État du Nil Blanc sont dus aux conditions de vie médiocres des réfugiés, comme la malnutrition, les diarrhées, les infections des voies respiratoires (dont la tuberculose), la malaria et les maladies de la peau. 

En 2019, MSF a effectué près de 120 000 consultations à El Kachafa - près de 10 000 par mois - et a admis plus de 5 000 patients. Soixante-trois pour cent des patients vus dans la zone de triage étaient des réfugiés. MSF a aidé plus de 670 femmes à accoucher, soit près de deux bébés par jour. Nous avons inscrit 196 nouveaux patients à notre programme de lutte contre la tuberculose et 94 à notre programme de lutte contre le VIH. 

Les expériences du conflit, le fait d'avoir été témoin et d'avoir souffert d'événements violents, ainsi que les défis de la vie de réfugié et l'incertitude quant à leur avenir ont laissé beaucoup de gens avec des problèmes de santé mentale. 

« Nous offrons aux gens un soutien psychosocial jusqu'à ce qu'ils se sentent en sécurité, jusqu'à ce qu'ils puissent reprendre une vie normale et se réintégrer dans la société », explique Alfatih Alsadig, conseiller en santé mentale.

4. Des pics récurrents de malnutrition

Un accès insuffisant à la nourriture, combiné à de mauvaises conditions de vie et à d'autres facteurs, entraîne des pics saisonniers de malnutrition. « Les admissions pour malnutrition augmentent de juin à septembre. C'est ce qu'on appelle la "période de soudure", la saison des pluies, où il n'y a rien à récolter », explique Zakina Adam, responsable de la nutrition.

08 janvier 2020, Etat du Nil Blanc, Soudan

La pharmacienne Fatima Alagib fournit à une mère et à son enfant les médicaments prescrits par le médecin du nouvel hôpital d'El Kachafa, dans l'État du Nil blanc au Soudan.

© MSF/Musab Sahnon

L'hôpital MSF d'El Kachafa possède le seul centre de stabilisation de la malnutrition de la région. En 2019, près de 1 000 enfants de moins de cinq ans souffrant de malnutrition sévère y ont été traités.

« Certains enfants mal nourris viennent avec d'autres problèmes médicaux, tels que la diarrhée chronique, la pneumonie ou les maladies de la peau. Cela aggrave leur état. Certains ont le corps tout entier enflé [œdème], ce qui peut entraîner une septicémie » explique Zakina. Elle ajoute que parfois les bébés de moins de six mois sont admis car leurs mères ne les allaitent pas correctement. « Nous organisons des séances d’information car c'est très important pour les bébés. Mon travail consiste à essayer de faire comprendre aux gens ce dont les enfants ont besoin. Quand je ne peux rien faire pour l'enfant, je suis très triste ».

MSF travaille dans l’Etat du Nil Blanc depuis 2014, à la suite d’un afflux massif de réfugiés sud-soudanais fuyant la guerre civile. Depuis, MSF a mis en place des activités, incluant des campagnes de vaccination, des interventions d’urgence et la gestion d’établissements de santé. 
Les services offerts à El Kachafa comprennent également la transfusion sanguine, les urgences, les soins maternels, pédiatriques et néonatals, ainsi que la santé sexuelle et reproductive, y compris les soins pour les victimes de violences sexuelles. Les patients souffrant de traumatismes graves et les femmes enceintes nécessitant une césarienne sont transportés d'El Kachafa vers les hôpitaux de Kosti et d'Al Jabaleen respectivement. 
MSF travaille au Soudan depuis 1978. Au cours des dernières années, nos opérations se sont concentrées sur six États : Al Gedaref, Kordofan Sud, Darfour Est, Darfour Nord, Nil Blanc et Khartoum, avec des équipes d'urgence intervenant dans d'autres régions en fonction des besoins. MSF gère des centres de santé où elle fournit des soins médicaux gratuits et de bonne qualité aux réfugiés, aux personnes déplacées et aux communautés d'accueil.