RDC: répondre à la nouvelle épidémie d’Ebola dans la province de l’Equateur
© MSF/Franck Ngonga
République démocratique du Congo (RDC)5 min
Le 1er juin 2020, une nouvelle flambée de maladie à virus Ebola (MVE) était déclarée dans la province de l’Equateur, dans l’ouest de République démocratique du Congo, la onzième épidémie d’Ebola enregistrée dans le pays.
Apparue alors que le pays était aux prises avec la dixième épidémie d’Ebola dans l’est de la RDC, et dans un contexte de pandémie Covid-19, cette nouvelle flambée d’Ebola s’est déjà étendue à 11 zones de santé de la province de l’Equateur, dans une région très difficile d’accès où certains villages ne le sont que par voie fluviale.
Si la réponse à cette nouvelle épidémie d’Ebola ne connait pas les défis sécuritaires de celle ayant affecté l’est du pays d’août 2018 à juin 2020, elle comporte toutefois d’importants défis logistiques.
L’épidémie se déroule dans une province grande comme deux fois et demi la Suisse, où certaines aires de santé ne sont accessibles que par pirogue, tandis que d’autres ne le sont qu’en parcourant des heures de routes difficiles à travers la forêt. Un seul hélicoptère est à la disposition des organisations humanitaires pour se déplacer.
« Pour ses interventions médicales d’urgence, l’équipe d’urgence Congo de MSF a en permanence un stock pré-positionné contenant des véhicules, des motos ou des moteurs hors-bords à installer sur des bateaux ou pirogues » explique Mathias Dembo, coordinateur logistique de Médecins Sans Frontières. « Ces équipements sont déployés selon les difficultés géographiques des zones d’intervention. Et dans cette province, il y en a beaucoup ! Pour atteindre la zone de santé de Bolomba par exemple, nous avons dû remonter la rivière Likelemba avec tous les équipements et le personnel sur des pirogues. »
Agir au plus proche des foyers actifs
À la suite de la déclaration de cette onzième épidémie d’Ebola en RDC, MSF a déployé des équipes dans les zones de santé de Bolomba, Bikoro, Monieka, Ingende et Lotombe afin de freiner la propagation de la maladie, soutenir la surveillance épidémiologique au niveau communautaire et soigner rapidement les patients dans les zones où la transmission est active et qui sont difficiles d’accès.
« L’épidémie se déplace avec la population vers des zones reculées par voie terrestre et fluviale, dans une province où les infrastructures sont rares et les villages éloignés les uns des autres » explique le Dr Maria Mashako, coordinatrice médicale MSF. « C’est pourquoi nous mettons en place une réponse décentralisée, en déployant en priorité nos équipes dans les aires de santé affectées les plus reculées, avec de petites structures facilement accessibles aux communautés. »
Au 1er septembre 2020, MSF soutenait neuf centres de traitement et d’isolement Ebola dans cinq zones de santé afin d’apporter les soins au plus près des foyers actifs de la maladie.
Dans la zone de santé de Bolomba, outre le soutien apporté au centre de traitement Ebola de l’hôpital général, MSF a ainsi mis sur pied deux petits centres de traitement et d’isolement dans les aires de santé reculées de Boso Mondomba et Yuli. La même approche décentralisée a été adoptée dans les zones de santé de Monieka et Bikoro, où MSF soutient quatre petites structures de soin et d’isolement dans des aires de santé difficiles d’accès.
« Nous ne nous limitons pas à soutenir la réponse à la seule épidémie d’Ebola » précise le Dr Mashako. « Nous soutenons aussi des centres de santé dans les foyers épidémiques et sur les grands axes de Bolomba et Bikoro afin d’y garantir la continuité des services de santé générale, et permettre une détection précoce des cas suspects. Cela se fait par exemple par des donations de médicaments, par des formations du personnel médical local sur Ebola ou sur la prévention et le contrôle des infections. »
L’importance de l’engagement communautaire
Peu d’informations circulent dans la province de l’Equateur sur cette épidémie qui affecte certaines zones n’ayant jamais été touchées par Ebola auparavant. C’est pourquoi les équipes de promotion de la santé de MSF soutiennent celles du ministère de la Santé pour renforcer la sensibilisation et la surveillance à base communautaire. A Bolomba, Bikoro et Monieka, cette sensibilisation est l’une des actions clés de MSF.
« Ma fille a été emportée par Ebola et, deux jours après, j’étais moi aussi hospitalisé » explique Samwengi Bokuma. J’ai eu plus de chance, j’ai survécu. « Pour empêcher d’autres drames dans la communauté, j’ai rejoint l’équipe de sensibilisation de MSF pour témoigner de mon cas auprès de ma communauté, leur expliquer quels sont les symptômes de la maladie. »
« Cette approche communautaire permet de donner des outils aux communautés pour détecter les cas suspects et faire rapidement remonter les alertes » poursuit le Dr Mashako. « Elle permet aux communautés de s’approprier la riposte à l’épidémie. »
A ces approches communautaires et décentralisées de réponse à l’épidémie vient également se greffer une intervention de vaccination soutenue par d’autres partenaires de la riposte. Depuis le démarrage de la vaccination le 5 juin 2020, le vaccin – rVSV-ZEBOV-GP, utilisé dans l’est du pays durant la dixième épidémie – a été administré à environ 26 500 personnes, selon les données officielles.
En date du 2 septembre, un total de 110 cas d’ Ebola a été enregistré dans la province de l’Equateur – 104 confirmés, 6 probables – dont 47 décès. Proche de la capitale Kinshasa, l’actuelle province de l’Equateur a connu sa dernière épidémie d’Ebola il y a deux ans, entre mai et juillet 2018. Les zones de santé de Bikoro et Iboko ainsi que sa ville de Mbandaka avaient à l’époque été l’épicentre de la neuvième flambée d’Ebola.
© MSF/Franck Ngonga