G8 : MSF appelle à la réforme du système d’aide alimentaire
© Stephanie Sinclair/ VII
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Toronto/Genève, le 22 juin 2010 – Selon l’organisation médicale humanitaire internationale Médecins Sans Frontières (MSF), les chefs d’État qui se rencontreront aux sommets du G8 et du G20 ne pourront améliorer la santé des mères et des enfants des pays en voie de développement, à moins qu’ils ne changent complètement leur approche de la malnutrition et qu’ils ne trouvent de nouveaux moyens de financement durables servant à combattre cette pathologie, que l’on peut facilement prévenir et soigner.
La malnutrition touche 195 millions d’enfants dans le monde. Elle est responsable du ralentissement de la croissance, de troubles cognitifs et d’une vulnérabilité excessive aux maladies. La malnutrition est la cause sous-jacente du tiers, au moins, des huit millions de morts annuelles d’enfants âgés de moins de cinq ans. Beaucoup de familles habitent des régions où la nourriture est difficile d’accès. Elles n’arrivent pas à se procurer les aliments à haute teneur protéinique et contenant des nutriments essentiels dont ont besoin leurs enfants, comme des œufs ou du lait. La majorité des aliments envoyés actuellement dans les programmes d’aide alimentaire internationale est composée de mélanges maïs-soja qui ne contiennent pas les nutriments dont ont le plus besoin les jeunes enfants.
« Des aliments que nous n’oserions jamais donner à nos propres enfants sont envoyés en tant qu’aide aux plus malnutris et donc aux plus vulnérables, en Afrique Subsaharienne et en Asie », affirme le Dr Christophe Fournier, président international de MSF. « Cette politique de deux poids deux mesures doit cesser. À titre de plus importants coopérants en aide alimentaire, les pays du G8 sont avantageusement positionnés pour jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre la malnutrition. Si les chefs d’État qui se rassemblent dans le Muskoka et à Toronto souhaitent vraiment réduire la mortalité maternelle et infantile, ils doivent absolument revoir des éléments clés du plan mondial d’aide alimentaire. Nous savons ce dont ont besoin les enfants, il ne s’agit que de le leur faire parvenir. »
En plus d’une amélioration du système d’aide alimentaire offert aux jeunes enfants, une réponse efficace à la crise mondiale de la malnutrition nécessitera des investissements significatifs. La Banque mondiale estime à 12 milliards de dollars par année le coût de la lutte contre la malnutrition dans les pays les plus touchés. Dans le climat d’austérité économique mondiale actuel, les fonds versés actuellement par les bailleurs de fonds sont insuffisants, instables et imprévisibles. Ce qu’il faut, c’est un financement durable par le biais de mécanismes financiers novateurs, tels que la taxe sur les transactions financières que promeut actuellement l’Union européenne. Une partie des fonds recueillis de cette façon doit être destinée aux problèmes de santé mondiaux négligés comme la malnutrition, le VIH/sida ou encore la recherche sur la tuberculose et son traitement.
« Les Organisations non gouvernementales ne devraient pas avoir à porter un tel fardeau pendant qu’elles luttent contre la malnutrition », dit le Dr Fournier. « Les gouvernements donateurs doivent combler le vide et venir en aide aux pays les plus gravement atteints, en leur permettant d’instaurer chez eux des programmes alimentaires qui ont déjà fait leurs preuves par le passé, en sauvant des vies entre autres au Mexique, en Thaïlande et au Brésil. Nous avons besoin de sources de revenus durables, comme la taxe proposée sur les transactions financières, dont une partie serait réservée à la santé mondiale, au lieu des promesses de dons uniques faites communément par les pays lors des sommets du G8. »
La rencontre du G8 coïncide avec le début de « la période de soudure » dans la région africaine du Sahel, une période particulièrement difficile du point de vue alimentaire où les semences d’aliments de base manquent avant la récolte suivante. La plupart des pays de cette région font déjà face à des taux croissants de malnutrition infantile. MSF offre des programmes d’alimentation d’urgence et prête main-forte à ceux déjà en place au Burkina Faso, au Tchad, au Niger, au Mali et au Soudan.
En 2009, MSF a soigné 208 000 enfants atteints de malnutrition sévère aiguë à travers ses programmes. Bien que ce chiffre représente à peine un pour cent des 20 millions d’enfants que l’on estime être touchés, il constitue de la même façon plus de 15 pour cent des 1 200 000 enfants qui ont pu recevoir un traitement.
MSF a récemment lancé la campagne multimédia mondiale « Starved for Attention », afin de mettre l’accent sur la crise de malnutrition infantile et la manière dont l’augmentation des maladies et des décès infantiles qui peut être évitée grâce à des programmes nutritionnels efficaces : www.starvedforattention.org.
© Stephanie Sinclair/ VII