Paludisme sévère: l’introduction des derniers traitements permettrait de sauver 200 000 enfants par an

District de Kitgum, Ouganda, 11.11.2009

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Genève, le 19 avril 2011 – MSF appelle au remplacement de la quinine par l’artésunate pour le traitement du paludisme sévère chez les enfants.

Dans un nouveau rapport, Médecins Sans Frontières (MSF) plaide pour l’introduction immédiate dans les pays africains du traitement à base d’artésunate pour les enfants atteints de paludisme sévère. Il permettrait de réduire la mortalité et d’éviter la mort d’environ 200000 personnes chaque année. MSF appelle les gouvernements africains à mettre en œuvre les recommandations de l’OMS prochainement publiées, modifier les protocoles et abandonner les traitements moins efficaces à base de quinine. MSF demande également à l’OMS et aux bailleurs de fonds de soutenir les pays concernés dans les changements à venir. 

«Les enfants atteints de paludisme sévère qui arrivent dans notre clinique souffrent souvent de convulsions, de vomissements et risquent l’état de choc. Il faut donc être capable de donner un traitement efficace le plus rapidement possible», explique Véronique de Clerck, coordinatrice médicale MSF en Ouganda. «Pendant plusieurs décennies, on traitait le paludisme sévère avec de la quinine, mais son utilisation peut se révéler difficile et dangereuse. Il est donc temps d’abandonner ce traitement. L’artésunate permettra de sauver davantage de patients souffrant de paludisme sévère: le médicament est plus sûr, plus simple d’utilisation et plus efficace que la quinine.»

La quinine doit être administrée trois fois par jour, via des perfusions intraveineuses lentes de quatre heures chacune. Ces soins peuvent donc s’avérer difficiles pour les patients et le personnel médical. A l’inverse, le traitement par artésunate (injection intraveineuse ou musculaire) ne dure que quatre minutes.

Des essais concluants

Fin 2010, un essai clinique a démontré que l’utilisation d’artésunate pour les enfants atteints de paludisme sévère permettait de réduire les risques de mortalité d’un quart. Cette étude réalisée dans neuf pays africains conclut que sur 41 enfants traités avec de l’artésunate plutôt qu’avec de la quinine, une vie supplémentaire est sauvée. De même, la complexité d’administration de la quinine multipliait par quatre s les risques de décès chez les enfants avant même le début du traitement. 

MSF, qui a participé à cet essai, a ensuite modifié complètement ses protocoles et souhaite aujourd’hui travailler avec les autorités sanitaires nationales pour introduire l’artésunate dans ses programmes au cours des prochains mois.

En dépit des données scientifiques, la transition est encore loin d’être évidente. La publication des nouvelles recommandations par l’OMS préconisant l’utilisation d’artésunate pour le traitement du paludisme sévère infantile en Afrique ne suffit pas.Un programme de soutien aux pays souhaitant remplacer la quinine doit être développé. De leur côté, les gouvernements africains doivent rapidement changer leurs protocoles et les bailleurs de fonds doivent les soutenir, financièrement si nécessaire.  L’artésunate est aujourd’hui trois fois plus chère que la quinine, mais la différence de 31 millions de dollars par an est peu significative face au nombre de vies (estimé à 200000) qui pourraient être sauvées grâce à une transition à l’échelle mondiale.

«Nous avons connu des situations similaires. Quand l’OMS a modifié ses recommandations de traitement contre le paludisme en 2001, les pays ont mis plusieurs années à s’y conformer. Et malheureusement, dans certains pays, des médicaments bien moins efficaces sont encore utilisés dix ans après», déplore le Dr Martin de Smet, coordinateur des activités contre le paludisme de MSF. «Pour le paludisme sévère, si l’on veut que des vies soient sauvées immédiatement, l’OMS devra s’assurer que l’évolution soit beaucoup plus rapide. Il n’y aucune raison pour ne pas effectuer  immédiatement cette transition.»

MSF et le paludisme

MSF a fourni des traitements anti-paludisme à environ un million de personnes en 2010. Le paludisme sévère tue chaque année plus de 600 000 enfants de moins de cinq ans en Afrique. Tous les ans, environ huit millions de personnes développent un paludisme sévère. Les malades présentent alors des signes cliniques de lésions aux organes, par exemple au cerveau, aux poumons, aux reins ou aux vaisseaux sanguins. Le nouveau rapport de MSF, Améliorer la prise en charge du paludisme sévère chez l’enfant, plaide pour un changement de protocoles du traitement contre le paludisme sévère chez les enfants. Il peut être téléchargé sur le site www.msfaccess.org