Combattre la dengue avec des moustiques : les résultats prometteurs d'une étude suscitent l'enthousiasme des chercheurs et des patient·e·s

Teresa Arteaga, qui réside dans le quartier de Canaán, participe à la libération de moustiques porteurs de Wolbachia aux côtés de Lorena Rodriguez, superviseure de la promotion de la santé pour MSF.

Honduras3 min

Le ciel d'El Manchén est toujours aussi bleu. Cette banlieue de la capitale du Honduras est toujours animée, les gens se bousculent pour se rendre au travail et les voitures klaxonnent dans la circulation dense. A l'œil nu, cette zone densément peuplée ressemble à ce qu'elle était il y a un an. Mais une équipe de Médecins Sans Frontières (MSF) a travaillé dur pour apporter un changement microscopique qui pourrait sauver des vies.

Un test récent a révélé que huit moustiques sur dix capturés à El Manchén sont porteurs de Wolbachia, une bactérie inoffensive présente dans plus de 50 % des insectes. Il y a un an, presque aucun des moustiques locaux ne l'était.

C'est important, car Wolbachia réduit considérablement la probabilité que les moustiques transmettent des maladies comme la dengue, une maladie potentiellement mortelle qui touche environ 100 à 400 millions de personnes dans le monde chaque année. L'équipe du projet de prévention des arbovirus de MSF a lâché plus de huit millions de moustiques délibérément infectés par la bactérie à El Manchén l'année dernière. Elle espérait que les moustiques se développeraient, se reproduiraient et transmettraient la Wolbachia de génération en génération, réduisant ainsi radicalement le taux de dengue dans la région.

Cependant, beaucoup de choses auraient pu se passer différemment. « Nous avons continué à relâcher des moustiques, ce qui a eu pour effet d'en augmenter le nombre dans la région et de déstabiliser les communautés locales. Au même moment, une autre épidémie de dengue s'est déclarée dans la capitale. Il était donc plus difficile de sensibiliser les gens sur cette maladie, mais en les faisant participer directement aux activités, nous avons pu faire tout ce qui était prévu », déclare Edgard Boquín, coordinateur du projet.

Nous avons travaillé en partenariat avec les communautés locales, les autorités sanitaires honduriennes, l'Université nationale autonome du Honduras (UNAH) et le Programme Mondial Anti-Moustiques (WMP). C'est un véritable travail d'équipe ! C'est la première fois que MSF et le WMP travaillent ensemble sur la prévention des arbovirus comme la dengue. Notre force en matière d'engagement communautaire et l'expertise technique du WMP se sont mutuellement complétées pour faire de ce projet une réalité.

Edgard Boquín, coordinateur de projet pour MSF
Les équipes MSF ont utilisé des motos dans le cadre de leur stratégie pour libérer des moustiques porteurs de Wolbachia à El Manchén. Chaque agent de libération transportait 20 bocaux contenant les moustiques porteurs de Wolbachia. Des libérations quotidiennes ont été effectuées pendant six mois. Au total, plus de 8 millions de moustiques ont été libérés.

Les équipes MSF ont utilisé des motos dans le cadre de leur stratégie pour libérer des moustiques porteurs de Wolbachia à El Manchén. Chaque agent de libération transportait 20 bocaux contenant les moustiques porteurs de Wolbachia. Des libérations quotidiennes ont été effectuées pendant six mois. Au total, plus de 8 millions de moustiques ont été libérés.

© Martín Cálix/MSF

Est-ce que cela a fonctionné ?

El Manchén avait auparavant l'un des taux de dengue les plus élevés de la ville. Toutefois, au cours de l'année écoulée, le nombre de cas a diminué par rapport aux années précédentes, et les taux sont inférieurs à ceux d'autres zones de la ville.

« Il est encore trop tôt pour crier victoire, déclare Edgard Boquín avec prudence. Nous avons testé 294 moustiques en septembre et nous avons été très satisfait·e·s de constater que 85,7 % d'entre eux étaient porteurs de Wolbachia. Il s'agit toutefois de résultats préliminaires. Au premier trimestre 2025, des tests définitifs seront effectués et nous diront dans quelle mesure cette stratégie a permis de réduire l'impact de la dengue à El Manchén. »

Même s'il se garde de manifester trop tôt son enthousiasme, le coordinateur du projet MSF est plein d'espoir. « C'est sans aucun doute prometteur, déclare-t-il avec un sourire de satisfaction. Si nous continuons sur cette voie, la méthode Wolbachia sera un outil positif pour réduire la dengue dans le pays. Pendant longtemps, nous avons vu comment les gens souffraient de cette maladie, mais aujourd'hui, nous entendons des histoires positives de la part de la communauté, qui nous dit que quelque chose est en train de changer après la dissémination de cette bactérie Wolbachia. Cela donne de l'espoir à celles et ceux qui ont connu la dengue ou qui ont vu l'un·e de leurs proches tomber malade. »