Gaza : soigner les blessés de la Marche du retour

31 octobre 2018, Al Awda, Gaza

Palestine3 min

Victimes des tirs à balles réelles de l’armée israélienne lors de la Marche du retour, les nombreux patients présentant des blessures graves surchargent le système de santé à Gaza. Des milliers d’entre-eux risquent des infections et des handicaps à vie.

Une véritable urgence sanitaire prend lentement forme à Gaza, alors que les besoins des patients grièvement blessés par les tirs de l’armée israélienne lors de manifestations sont en augmentation. La grande majorité des 3 117 patients que MSF a traités pour des blessures par balles du 30 mars au 31 octobre ont été blessés aux jambes, entraînant pour la moitié des fractures ouvertes et pour l’autre moitié des lésions graves des tissus. La gravité de ces blessures, combinée à l’absence de traitement adéquat au sein d’un système de santé extrêmement précaire signifie que le risque d’infection est très élevé, en particulier pour les patients avec des fractures ouvertes. Bien qu'il n'y ait pas actuellement, à Gaza, la possibilité de diagnostiquer des infections osseuses, les estimations les plus conservatrices de MSF indiquent qu’au moins 25% des patients avec fractures ouvertes souffriraient d’infections. Avec un total d’environ 3 000 fractures ouvertes, plus d’un millier de personnes serait probablement infectées.

MSF a déjà triplé sa capacité à Gaza mais le volume nécessaire de chirurgie, d’antibiotiques et de soins intensifs infirmiers est sidérant. Un tel nombre de patients mettrait les meilleurs systèmes de soins au monde sous pression. A Gaza, c’est dévastateur.

Marie-Elisabeth Ingres, cheffe de mission de MSF en Palestine.

Devant l’ampleur de la crise, les acteurs de la santé présents à Gaza ont besoin de soutien

Sur la base d’une analyse préliminaire des patients de MSF à Gaza, au moins 60% des blessés totaux, soit 3 520 personnes, auront besoin de soins chirurgicaux supplémentaires, de physiothérapie et de rééducation. De plus, une proportion significative de ces patients aura besoin de chirurgie reconstructive, mais des infections non soignées empêcheront toute possibilité de traitement. Cette  charge est trop lourde à supporter pour le système de santé tel qu’il existe à Gaza, affaibli par plus d’une décennie de blocus.

Les conséquences de ces blessures peuvent aller jusqu’au handicap permanent pour certains et mener à l’amputation ou au décès en cas d’infections non soignées.

Bien que MSF et d’autres acteurs travaillent au mieux pour fournir des traitements à ces patients, l’échelle des besoins devient ingérable.  La situation se dégrade d’autant plus vite que des personnes blessées par balle continuent d’arriver dans les centres de santé, présentant des nécroses des tissus et des os, qui ne cessent d’augmenter les  risques d’infection. Une réponse adéquate coûtera des dizaines de millions d’euros, une somme qui doit être trouvée d’urgence.

Les autres pays de la région et du monde doivent se porter volontaires, offrir des financements et/ou de l’espace dans les hôpitaux où existent des capacités chirurgicales avancées.

Marie-Elisabeth Ingres

« Ce qui s’impose maintenant c’est que les autorités israéliennes et palestiniennes fassent leur possible pour faciliter l’accès et le travail de tous les acteurs de santé qui essayent de renforcer les capacités de prise en charge sur place. Afin de soulager le système de santé de la région,  les autorités en Palestine et en Israël doivent faciliter le transfert de ces patients à l’étranger » explique Marie-Elisabeth Ingres. « On ne peut pas concevoir d’abandonner des milliers de patients à leur sort, avec des blessures si terribles qu’un grand nombre risque d’être handicapé à vie, quand un traitement adéquat est à portée de main. » 

MSF a plus de 260 personnel travaillant à travers quatre hôpitaux et cinq cliniques post-opératoires à Gaza, fournissant des pansements, de la physiothérapie et de la chirurgie plastique, reconstructive simple et orthopédique.