Haïti: Le temps passe, les besoins médicaux persistent
© Michael Goldfarb/MSF
5 min
Quatre mois après le tremblement de terre qui a dévasté Haïti, les équipes de MSF continuent d’adapter leurs activités pour répondre aux besoins médicaux changeants mais toujours importants. Dans une vingtaine de sites fixes et à travers plusieurs activités de cliniques mobiles, MSF apporte des soins de santé primaires et secondaires gratuits à la population.
« Plus d’un million de personnes continuent de vivre dans des conditions déplorables, sous des tentes ou des bâches en plastique, sans perspectives claires pour les mois à venir », explique Stefano Zannini, Chef de mission en Haïti. « Entre-temps, les pluies se sont intensifiées et inondent les sites de sinistrés plusieurs fois par semaine. »
De telles conditions entraînent des risques accrus pour la santé des populations. Depuis le 12 janvier, MSF a apporté des soins médicaux à 137 000 patients. Dans les structures de soins de santé primaires, les pathologies soignées aujourd’hui sont principalement les infections respiratoires et les maladies hydriques (liées à l’eau), telles que le paludisme et les diarrhées. Depuis la fin mars, 71 cas suspects de fièvre typhoïde, une maladie liée aux mauvaises conditions d’hygiène, ont été pris en charge à l’hôpital Choscal, dans le quartier de Cité Soleil.
Dans un pays où 60% des structures médicales ont été sévèrement endommagées ou complètement détruites, MSF s’efforce de répondre aux besoins en soins médicaux de seconde ligne en gérant ou appuyant des hôpitaux et des structures médicales spécialisées. « Il y a les patients blessés pendant le tremblement de terre qui ont besoin de chirurgie orthopédique et de reprise, mais il y a aussi les besoins de santé du quotidien qui ont repris leurs droits, comme les accidents de voiture ou les accidents domestiques », explique John Pratt, médecin à l’hôpital Saint-Louis de MSF à Port-au-Prince.
La prise en charge des cas obstétricaux constitue également une priorité. Au centre hospitalier d’Isaie Jeanty, à Port-au-Prince, 635 accouchements avec complications, dont 131 par césarienne, ont été pris en charge en avril. A Léogâne, MSF a effectué 514 interventions chirurgicales, en majorité des cas obstétricaux.
A l’hôpital de Saint-Louis, MSF a mis en place l’unique service spécialisé pour les grands brûlés disponible dans le pays. Le service compte trois tentes et 27 lits pour enfants et adultes grands brûlés. La majorité des patients sont des enfants qui se sont brûlés lors d’accidents domestiques survenus dans les abris de fortune trop étroits où vivent souvent des familles nombreuses.
Trois structures spécialisées de MSF continuent d’assurer la rééducation fonctionnelle des patients, comprenant notamment la kinésithérapie, l’aide psychologique et d’autres services de suivi. Ces soins post-opératoires, en ambulatoire et en hospitalisation, sont également intégrés à d’autres structures gérées ou appuyées par MSF en Haïti. Au cours des quatre derniers mois, MSF a pris en charge plus de 14 600 patients pour des soins post-opératoires.
Des psychologues ont apporté des soins en santé mentale à 69 000 personnes au sein des structures médicales MSF ainsi que dans les camps, auprès des personnes sinistrées. Quatre mois après le séisme, beaucoup d’Haïtiens ressentent encore la terre trembler et le bruit est toujours présent. On rencontre un grand nombre de déclenchements psychotiques aigues", explique le Dr Maryvonne Bargues, psychiatre MSF. "Il y a une dépression collective derrière les sourires qui évoquent le Port au Prince d'avant. Les gens savent que le provisoire va s'inscrire dans la durée. On constate un découragement chez des personnes qui ne sont pourtant pas résignées."
En avril, MSF a pris en charge 81 victimes de violences sexuelles dans ses différentes structures à Port-au-Prince. Les soins offerts à ces personnes comprennent une assistance psychologique et médicale, notamment le vaccin contre l’hépatite B et un traitement préventif contre le VIH/sida.
Avec l’arrivée des pluies et l’approche de la saison des ouragans (août-septembre), MSF transfère progressivement ses activités médicales en tentes vers des structures permanentes ou semi-permanentes. Ainsi, à Léogâne, la construction d’un hôpital en containers de 120 lits a débuté début mai. Il est destiné à remplacer l’hôpital détruit par le séisme. A Jacmel, où l´hôpital a été en grande partie détruit, les services de chirurgie, maternité, médecine interne et pédiatrie sont désormais organisés dans une structure semi-permanente. De nombreux travaux de réhabilitation ont lieu également au sein des structures publiques appuyées par MSF.
Les régions situées en dehors de Port-au-Prince n’ont pas autant été touchées par le tremblement de terre mais ont accueilli des centaines de milliers de personnes qui quittaient la capitale. Afin d’évaluer la situation et les besoins médicaux, une équipe MSF s’est rendue dans plusieurs localités, entre autres Gonaïves, Port-de-Paix, Cap Haïtien, Fort-Liberté, Saint-Marc et Les Cayes. Dans ces régions, les besoins directement liés au tremblement de terre ne sont pas évidents mais l’accès aux soins de santé dans les zones rurales reste médiocre. Après une analyse plus détaillée des résultats de ces évaluations, MSF pourrait décider un renforcement de ses activités dans certaines régions.
Enfin, MSF se prépare à répondre à une éventuelle augmentation des besoins d’urgence liée à l’arrivée des pluies et à une possible détérioration de la situation médicale à Port-au-Prince et dans le pays à trois mois de la saison des ouragans. Du matériel médical et logistique supplémentaire a été commandé et sera disponible dans les semaines à venir afin d’intervenir en fonction des besoins.
© Michael Goldfarb/MSF