Inondations dans le désert: des fortes pluies frappent le Tchad déjà victime d’une crise nutritionnelle

Ouverture d’un cinquième programme nutritionnel dans la région de Guéra, à l’est du Tchad, MSF appuie depuis le mois de juillet le Centre Nutritionnel Thérapeutique Hospitalier (CNTH). Tchad 21/07/2010

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Le nombre d’admissions dans les programmes nutritionnels MSF est toujours très élevé.

« Au Tchad, la saison des pluies est à la fois une malédiction et une bénédiction pour les personnes vivant dans cette zone de sécheresse où les récoltes ont été mauvaises et la sécurité alimentaire n’est pas assurée, » explique le docteur Kodjo Edoh, chef de mission MSF au Tchad. « C’est bien pour la population nomade, qui dépend des produits animaliers comme le lait ou la viande. Ils pourront faire paître leur bétail et leur situation alimentaire s’améliorera bientôt. Mais, la majorité des personnes qui vivent dans les régions où nous travaillons, c’est-à-dire à Am Timan et Bokoro, sont des agriculteurs. En ce moment ils sont en train de semer, mais une partie des graines est emportée par les fortes pluies et les inondations. Cela retardera les récoltes jusqu’à fin octobre ou novembre et rendra probablement la crise nutritionnelle encore plus grave. »

Le Tchad est frappé par les pires inondations que le pays ait connues en dix ans. Dans la région de Sebab, près de Am Timan où MSF gère un hôpital de 100 lits, près de 6 000 personnes sont sinistrées. « La situation actuelle à Sebab ne leur permet même pas d’allumer un feu. Ils viennent de construire un mur avec des sacs de sable pour protéger des parties du village ainsi que le centre de santé, mais l’eau a déjà débordé » raconte Jean-François Harvey, coordinateur de projet MSF à Am Timan. « Leur représentant, que j’ai rencontré à Am Timan la semaine dernière, m’a dit qu’ils dormaient très peu car ils craignent que le niveau des eaux n’augmente encore. Actuellement, le village est inondé sur deux côtés. Pour se rendre à MSF, ils doivent nager et utiliser un vélo. » A Kerfi, où l’organisation gère un centre de santé, près de 5 000 personnes sont touchées par les inondations. MSF leur a fourni des sacs vides afin d’élever les barrages. L’équipe cherche des moyens plus viables pour évaluer les besoins de la population affectées.

« En juillet, à Kerfi, le taux de patients qui ne sont pas revenus au centre de santé comme ils le devaient est passé de 8,5 à 20,5 %. Les personnes vivant à l’extérieure de la ville se sont retrouvées isolées par les inondations et n’ont pas pu joindre le centre. La population du Tchad n’a pas eu de chance: le manque de pluie a créé une crise nutritionnelle qui va empirer à cause de pluies désormais trop abondantes » explique le docteur Edoh.

Avec les pluies vient aussi une augmentation des cas de paludisme. Dans un contexte où l’accès aux soins est limité, le paludisme sera une menace supplémentaire pour la vie des enfants souffrant de malnutrition et déjà fragilisés. « Nous allons devoir faire face à une association fatale de malnutrition, paludisme et d’inondations » dit le docteur Edoh.

A Bokoro et Am Timan seulement, entre mai et juillet, 1’914 enfants ont été admis dans le programme nutritionnel MSF. « Lorsque nous sommes intervenus à Bokoro en mai dernier, nous n’avons pu éviter la mort de beaucoup d’enfants, ceux qui se présentaient trop tard ou dont les parents avaient préféré s’adresser aux guérisseurs traditionnels. Mais avec une augmentation de notre effectif et des acteurs communautaires en vue de sensibiliser les communautés, nous sommes mieux acceptés par les communautés et avont pu améliorer la qualité des soins dans les centres nutritionnels. Ainsi, le taux de mortalité dans nos programmes a chuté de 21% en juin à 5% en juillet. » Les efforts continuent et de nouveaux centres nutritionnels et projets sont ouvert dans différents endroit du pays.
 
MSF gère actuellement des programmes nutritionnels dans les régions tchadiennes d’Hadjer Lamis, de Batha, de Guéra, de Chari Baguirmi,  dans l’Ouaddai et Salamat, ainsi que dans la capitale N’Djamena. Depuis le début de l’année, 15 776 enfants soufframt de malnutrition ont été admis dans les programmes  MSF, la grande majorité au cours des trois derniers mois.