Libre de décider, avorter en toute sécurité
© Miora Rajaonary
La liberté de choisir, la sécurité et la dignité de nos patientes sont au cœur de nos activités de prise en charge des avortements sécurisés. Notre principale préoccupation est de déterminer la meilleure manière de leur apporter notre soutien.
Des complications jusqu'à sept fois plus graves dans les régions en crise ou en conflit
Les grossesses non désirées exposent nos patientes à toutes sortes de difficultés. En effet, les femmes qui n’ont pas la possibilité de recourir à une interruption de grossesse sécurisée risquent des complications très sévères, allant jusqu’au décès. Dans de nombreux pays, les obstacles à l'avortement sécurisé, tels que les restrictions juridiques et le coût des transports et des services de santé, sont nombreux. Les injustices, les inégalités sociales, les guerres, les crises et les catastrophes naturelles aggravent d’autant plus ces conditions.
Avec d’autres organisations, nous avons publié une étude sur les complications liées aux avortements pratiqués dans des conditions dangereuses au Nigeria et en République centrafricaine. En prenant deux exemples d'hôpitaux, nous avons pu démontrer que les complications dans les régions en crise ou en conflit sont jusqu'à sept fois plus graves que dans des contextes stables. Cela renforce la nécessité d'offrir des interruptions de grossesse sécurisées, dans toutes les régions où nous intervenons.
« Toute ma famille m'a soutenue dans cette démarche ».
« Mon médecin m'avait dit qu'il était dangereux pour moi de retomber enceinte, car j'avais déjà subi quatre césariennes. Si cela avait été nécessaire, j'aurais cherché, par tous les moyens, de mettre fin à ma grossesse. Il y a beaucoup de possibilités - des plantes, des choses à boire. Je ne peux pas tomber enceinte une nouvelle fois, car je risquerai de mourir », raconte Marisol, qui a fui le Venezuela pour se réfugier en Colombie.
Sur place, notre équipe a conseillé Marisol et l'a aidée à obtenir les médicaments nécessaires. Mais ses proches ont été sa principale source de soutien : « Toute ma famille m'a soutenue dans cette démarche. J'ai déjà des enfants. Je veux les voir grandir ».
« Combien de temps devrons-nous encore souffrir ? »
Outre les obstacles juridiques et financiers, les tabous sur le sujet et la stigmatisation sociale constituent d'autres barrières sur le chemin d'une interruption de grossesse. Souvent, il manque également des informations librement accessibles sur le lieu et la manière dont les avortements sont pratiqués.
« Quand j'ai appris que j'étais à nouveau enceinte, j'ai beaucoup pleuré. Je n'ai pas la force de mettre d'autres enfants au monde. Dans notre société, il est très difficile pour les femmes de parler d’avortement. Combien de temps encore devrons-nous souffrir de cette situation ? Il semble que des siècles se soient écoulés, mais rien n'a changé », dit Amita*, qui est venue nous voir en tant que patiente à New Dehli, en Inde. Elle avait entendu parler de notre clinique par une voisine et y a cherché de l'aide.
Au début, j'étais très gênée de venir dans cette clinique pour avorter. Mais grâce à l'aide apportée ici, j'ai pu surmonter mon embarras et me sortir de cette situation difficile. J'ai reçu les médicaments nécessaires à l'avortement et toute l'aide dont j'avais besoin. J'ai également reçu des contraceptifs pour ne pas retomber enceinte.
*Nom modifié pour protéger la vie privée
Nous avons encore du chemin
L'interruption de grossesse impacte tout particulièrement les traditions culturelles et idéologiques ainsi que les conceptions éthiques. Il est donc important que nous ayons un bon échange à ce sujet au sein de notre organisation. Nous formons nos collaborateur·ice·s dans le monde entier par le biais d'ateliers et de formations. Nous les informons sur les données et les faits relatifs à l'interruption de grossesse et leur offrons un espace pour réfléchir à leurs attitudes et leurs valeurs.
Il s'agit en premier lieu de sensibiliser aux conséquences que peut avoir un rejet sur les femmes enceintes qui cherchent de l'aide.
Dans certains cas particulièrement graves, il peut arriver que nous devions retirer l'utérus de jeunes femmes en raison de complications résultant d'un avortement pratiqué dans de mauvaises conditions. C'est très tragique et c'est une intervention difficile. Cela montre également qu'il ne suffit pas seulement de traiter les complications qui surviennent après des avortements dangereux et qu’ils peuvent avoir de lourdes conséquences. Nous devons agir en amont et prévenir ces complications en proposant partout des avortements sécurisés.
Notre principe des trois piliers
Nous essayons donc d'adopter une approche globale dans le plus de projets possibles en nous basant sur trois piliers : Nous rendons possible des interruptions de grossesse médicamenteuses et chirurgicales sûres, nous offrons un suivi médical après des interruptions dangereuses et nous fournissons des conseils et un soutien pour les questions de planning familial et de contraception.
Ces dernières années, nous avons considérablement développé les soins dans ce domaine. En 2022, nous avons pratiqué 44 900 interruptions de grossesse sécurisées dans le monde.
© Miora Rajaonary