MSF réorganise ses activités médicales post-séisme en Haïti
© Yann Libessart/MSF
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Le tremblement de terre à Port-au-Prince a déclenché la plus vaste opération d’urgence de l’histoire de MSF. Revue des opérations un an et demi plus tard.
Trente cinq secondes. C’est le temps qu’il a fallu au séisme du 12 janvier 2010 pour bouleverser l’existence de millions d’Haïtiens. Avec plus de 300 000 blessés et 1,5 millions de sans-abri, l’urgence humanitaire fut instantanée et massive. A partir d’octobre, une épidémie de choléra a prolongé l’urgence, avec 250 000 cas au cours des 5 premiers mois; dont près de la moitié pris en charge par MSF. Aujourd’hui, alors que l’épidémie redémarre et que la saison des ouragans approche, MSF réorganise ses programmes médicaux dans la zone touchée par le séisme, où l’offre de soins était déjà insuffisante avant le désastre.
Fini le camping
«Notre centre de traumatologie de la Trinité, ouvert fin 2006, s’est effondré, tuant sept patients et deux de nos collègues», raconte le Dr Pierre Wagner, directeur des urgences. «En moins de deux semaines, nous avions repris toutes nos activités dans des tentes gonflables montées sur le terrain de sport de l’école Saint-Louis de Gonzague. Nous y avons effectué plus de 16 000 consultations en salle d’urgence et 9 000 opérations chirurgicales. Mais il est temps aujourd’hui de quitter cette installation provisoire, d’autant plus que l’école veut récupérer son terrain. Le Dr Wagner est en train d’organiser le transfert de son service dans un nouvel hôpital de 170 lits conçu et financé par MSF. L’objectif est d’améliorer l’accès aux soins gratuits pour les quartiers périphériques de Port-au-Prince, où s’entassent les populations les plus vulnérables.
A Cité Soleil, le plus grand bidonville de la capitale, MSF appuie l’hôpital public Choscal depuis 2004. «Nous allons nous retirer à la fin de l’été pour que le ministère de la Santé puisse assumer à nouveau la gestion médicale», confie le chef de mission Gaëtan Drossart. «Nous construisons une autre structure hospitalière de 114 lits à l’est de l’agglomération.» Sur une parcelle du parc industriel de Tabarre, une centaine d’ouvriers est ainsi à pied d’œuvre. «Le terrassement a débuté en novembre. Il y a maintenant 268 modules à assembler avant de pouvoir ouvrir à l’automne», précise Adélaïde, la cheffe du chantier.
S’adapter à la situation
Depuis 2005, MSF s’était également investi dans la santé des femmes à Port-au-Prince. La mortalité maternelle en Haïti était déjà la plus élevée du continent avant le séisme. «Notre hôpital-maternité a subi de gros dégâts le 12 janvier et les équipes sont allées renforcer le secteur public pendant presque un an. En parallèle, nous construisions un nouveau centre obstétrique d’urgence de 100 lits sur la commune de Delmas qui a ouvert en mars dernier», explique le Dr Hans Boucher, directeur médical. «Nous ne prenons pas les accouchements normaux car il existe suffisamment d’endroits pour cela. Notre volonté est d’être un centre de référence pour les cas les plus compliqués, tels que l’éclampsie et l’hypertension, quand la vie de la mère ou de l’enfant est en danger.»
Les équipes MSF déjà présentes en Haïti avant la catastrophe ont pu démarrer tout de suite les secours. Des renforts sont vite arrivés. «Nous cherchions à nous installer dans les quartiers sud de la capitale, où la densité de population est très forte», se souvient Olivier, le responsable du projet. «Nous avons transformé une clinique dentaire en un hôpital d’urgence de 80 lits pour la chirurgie et les soins pédiatriques. Mais avec l’ouverture de grands hôpitaux construits par MSF, nous devrions fermer à la fin du mois de juillet.»
Sur l’épicentre
«A Léogâne, où était l’épicentre du séisme, nous avons constaté d’énormes besoins médicaux, 80% des bâtiments avaient été détruits et aucune structure de santé ne fonctionnait», rappelle le coordinateur Gérard Bedock. Un nouvel hôpital MSF a ainsi vu le jour, tout d’abord sous de simples tentes avant d’intégrer des structures en containers pour atteindre aujourd’hui 150 lits. Silas Adamou, le responsable médical, précise: «Les cas que nous recevons ne sont plus liés au tremblement de terre. Nous sommes désormais l’hôpital communal de référence. L’objectif à terme est de le rétrocéder au ministère de la santé».
Toutes ces nouvelles structures hospitalières sont construites en coordination avec les autorités sanitaires haïtiennes et intègrent les risques sismiques et cycloniques dans leur conception. MSF a consacré 100 millions d’euros de son budget total à Haïti en 2010 et prévoit 50 millions pour 2011. Environ 3'000 Haïtiens et 250 expatriés travaillent pour MSF dans le pays.
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