Ouganda : “L’épidémie d’Ebola peut être contenue, si on parvient à limiter la propagation du virus”
© Agus Morales/MSF
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Kagadi (district de Kibaale, ouest de l’Ouganda). Ebola est une maladie rare, mais Olimpia de la Rosa (née à Madrid en 1972) la connaît bien.
En 2007 elle a déjà participé à la prise en charge de la précédente épidémie qui s’est déclarée à Bundibuyo, également en Ouganda. Cinq ans plus tard, elle coordonne l’intervention de l’équipe de MSF qui, sur place, lutte pour contenir la propagation de cette nouvelle épidémie.
Quelle est la situation actuelle ? Combien de décès ont été enregistrés pour le moment ?
A ce jour, 36 cas suspects ont été enregistrés, parmi ceux-ci, 14 sont décédés. Les tests de laboratoires ont confirmé qu’il s’agit du virus Ebola.
Où se situe l’épicentre de cette nouvelle flambée ?
Dix-huit cas probables d’Ebola ont été admis à l’hôpital de Kagadi, dans le district occidental de Kibaale. C’est de là que MSF à lancé une intervention d’urgence pour limiter la propagation du virus.
La population de Kagadi craint-elle une propagation de l’épidémie ?
Il y a clairement des craintes dans la communauté, mais l’hôpital reste ouvert et la situation dans la zone est relativement calme. Si nous intervenons de manière adéquate, il sera possible de garder cette épidémie sous contrôle.
Le président ougandais a appelé ses concitoyens à éviter tous contacts directs entre eux. Que pense MSF de cette mesure ?
C’est vrai qu’éviter tout contact direct avec quelqu’un d’autre est un bon moyen de se protéger. Mais seules les personnes qui ont des symptômes sont contagieuses, la population ne doit donc pas avoir peur de sortir dans les rues. Il est aussi important d’éviter les contacts avec les fluides corporels d’autres personnes, mais ceci n’est réellement nécessaire que dans la région de Kigadi.
Est-il possible de guérir de la fièvre Ebola ?
Il n’y a à ce jour aucun traitement spécifique contre cette maladie, mais certains patients en guérissent. Le taux de mortalité dépend du type de virus Ebola (il y en a 5 au total). Cette épidémie est apparentée au virus Ebola-Soudan qui est apparu pour la première fois au Soudan en 1976. Ce virus est mortel dans environ 70% des cas.
Quels soins peuvent être donnés aux patients ?
Les cas sévères nécessitent des soins intensifs. Les patients sont souvent déshydratés et requièrent un traitement de réhydratation orale. Il n’y a pour le moment aucun traitement ou vaccin spécifique pour la fièvre Ebola. Plusieurs vaccins potentiels sont en cours d’évaluation, mais on devra sans doute attendre plusieurs années avant qu’un vaccin ne soit disponible.
Que fait MSF pour contenir cette épidémie ?
L’objectif de l’intervention de MSF est d’éviter que l’épidémie se propage, et éviter l’apparition de nouveaux cas. Nous participons à un effort conjoint visant a contenir l’épidémie qui consiste non seulement à soigner les patients, mais également à identifier rapidement de nouveaux cas pour les soigner et les isoler. Nous avons mis sur pied des équipes de promotion de la santé qui diffusent à la population des informations sur les symptômes de la maladie et comment s’en protéger.
Pourquoi les équipes de MSF portent-elles des tuniques spéciales lorsqu’elles traitent les patients ?
Ebola est une fièvre hémorragique qui se transmet par le contact avec les fluides corporels des personnes symptomatiques, ou des animaux. Il est donc essentiel d’éviter tout contact avec les fluides corporels des patients, ainsi que les vêtements qu’ils ont porté. Les équipes de MSF portent donc ses tuniques pour se protéger du virus.
Quand les premiers cas ont-ils été enregistrés ?
L’épidémie actuelle à officiellement été déclarée le 28 juillet, lorsque les résultats des analyses ont été rendus publiques, mais il semblerait que les premiers cas remontent au 12 juillet. Dans un premier temps, les symptômes d’Ebola ressemblent aux premières phases d’autres maladies contagieuses, donc toute personne qui montre des symptômes doit être prise en charge. Il semblerait que le premier cas ait été une fillette de 3 mois, dont la mère était également malade. Lorsqu’elle est décédée, sa famille a tenté de connaitre les raisons de sa mort, mais n’en a pas trouvé la cause, ce qui fait qu’ils ont suspecté un cas de sorcellerie. Environ 65 personnes se sont rendues à ses funérailles. Quinze d’entre elles sont tombées malades, dont 11 sont décédées depuis lors.
Pourquoi les contagions sont si fréquentes lors des enterrements ?
La contagion se produit suite à un contact avec les fluides corporels de personnes infectées – symptomatiques ou décédées. Lors des cérémonies funéraires, il est courant de manipuler les corps, sans prendre de mesures de protection spécifiques. La majorité des cas qui sont décédés dans ce début d’épidémie sont des membres de cette même famille qui ont participé à l’enterrement de la première victime.
Des cas ont-ils été enregistrés dans la capitale Kampala ?
Pour le moment, la majorité des cas identifiés l’ont été dans la région de Kibaale, où MSF a démarré son intervention d’urgence.
© Agus Morales/MSF