Tuberculose: appel urgent pour améliorer l’accès au dépistage pour des traitements plus rapides et efficaces
© Jasňa Riegerová/MSF
Tadjikistan6 min
22 mars 2023 : Médecins Sans Frontières (MSF) appelle gouvernements et donateurs à accélérer l'accès aux nouveaux traitements* plus courts, plus sûrs et plus efficaces contre la tuberculose résistante aux médicaments (TB-R), ainsi qu'aux tests de diagnostic nécessaires à leur mise en œuvre. MSF rejoint l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et d'autres acteurs dans cet « appel à l'action/à agir ? » avant la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose. MSF a, par ailleurs, exhorté la société américaine de diagnostic Cepheid à baisser le prix de ses tests GeneXpert, essentiels pour que les personnes atteintes de TB-R puissent être diagnostiquées à temps.
L'OMS a publié de nouvelles directives en décembre 2022 qui recommandent aux pays de mettre en place le traitement BPaLM*, plus sûr et plus rapide, pour traiter les personnes atteintes de tuberculose, en se basant en partie sur les résultats de l'essai TB PRACTECAL de MSF. Il s’agit d’un essai clinique randomisé contrôlé mené dans plusieurs pays et qui a démontré qu’un nouveau schéma thérapeutique, d’une durée de six mois et entièrement oral, est plus sûr et plus efficace pour traiter la tuberculose multirésistante (TB-MR) que les options actuelles qui sont plus longues et causent d’importants effets secondaires chez les personnes souffrant de cette maladie infectieuse.
Il est essentiel pour nous d’avoir un meilleur accès aux tests permettant de diagnostiquer la tuberculose et la résistance aux différents médicaments utilisés pour la traiter, afin que nous puissions identifier un plus grand nombre de personnes ayant besoin d’une prise en charge et mettre en place des schémas thérapeutiques entièrement oraux, plus courts et plus sûrs.
« Pour moi, ces deux dernières années, tout a tourné autour de la tuberculose, raconte Maria** qui a subi deux longues années de traitement qui n'ont pas réussi à la guérir de la tuberculose ostéoarticulaire et qui a ensuite reçu le traitement BPaLM en Biélorussie. Vivre ainsi était impossible. Les gens qui prenaient l’ancien traitement ne peuvent rien faire parce qu'ils se sentent mal en permanence. Si seulement j'avais commencé par [le nouveau] le traitement plus court tout de suite, ma vie aurait été différente. »
L'accès aux tests permettant de diagnostiquer la résistance est l'un des principaux obstacles à la mise en œuvre de schémas thérapeutiques plus sûrs et plus courts pour la tuberculose ostéoarticulaire. Actuellement, dans les pays où les taux de tuberculose sont très élevés, le test GeneXpert MTB/RIF de la société américaine Cepheid est le test de diagnostic moléculaire rapide le plus largement disponible pour détecter la résistance à la rifampicine, le médicament de première intention. En dépit des volumes de vente importants dans ces pays, et d’une analyse de MSF révélant que la production d'un test coûte moins de 4,6 CHF (5 $) à Cepheid, l'entreprise maintient le prix du test à 9,2 CHF (9,98 $) depuis plus d'une décennie.
Les pays devraient commencer à déployer le régime BPaLM de 6 mois pour traiter la tuberculose ostéoarticulaire et assurer la disponibilité nationale des tests GeneXpert MTB/RIF, ou, lorsque cela est possible, déployer les alternatives recommandées par l'OMS telles que les tests Truenat MTB/RIF, pour détecter la tuberculose résistante à la rifampicine, afin que les personnes atteintes de tuberculose ostéoarticulaire puissent recevoir ce traitement sans délai.
« Il est essentiel pour nous d’avoir un meilleur accès aux tests permettant de diagnostiquer la tuberculose et la résistance aux différents médicaments utilisés pour la traiter, afin que nous puissions identifier un plus grand nombre de personnes ayant besoin d'un traitementd’une prise en charge et mettre en place des schémas thérapeutiques entièrement oraux, plus courts et plus sûrs », martèle Stijn Deborggraeve, référent diagnostic pour la campagne d'accès aux médicaments essentiels de MSF. Nous demandons une fois de plus à Cepheid de réduire le prix des tests de dépistage de la tuberculose à un maximum de 4,6 CHF (5 $) l'unité, afin que davantage de personnes atteintes de tuberculose pharmaco-résistante puissent être diagnostiquées à temps et bénéficier de traitements moins pénibles au quotidien, et qui surtout leur sauve la vie. »
Les prix des médicaments doivent également continuer d’être revus à la baisse : pour cela, il faut que ces schémas thérapeutiques novateurs soient intégrés à plus grande échelle dans les programmes nationaux de traitement de la tuberculose afin d'augmenter la demande, et qu'un plus grand nombre de fabricants fournissent des versions génériques abordables de la bédaquiline et du Prétomanide. Le prix le plus bas disponible pour ce nouveau traitement contre la tuberculose est actuellement encore de 522 CHF (570 $). MSF demande à ce que le prix d'un traitement complet contre la tuberculose, y compris le traitement BPaLM, ne dépasse pas 456 CHF (500 $). Cinq pays dans lesquels MSF opère ont commencé à mettre en œuvre les schémas plus courts à ce jour : la Biélorussie, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, la Sierra Leone et le Pakistan. Des prix moins élevés permettront le déploiement de ce traitement dans grand nombre d’autres pays.
« Dans un pays comme l'Afghanistan, où les gens luttent pour se procurer les produits alimentaires de base, et de quoi payer les frais de voyage et médicaux pour l'hôpital, pouvoir traiter les personnes atteintes de tuberculose résistante aux médicaments en six mois, au lieu de deux ans comme c’est le cas avec les anciens schémas thérapeutiques, serait une bénédiction, déclare le Dr Geke Huisman, coordinateur médical MSF en Afghanistan. L'accès à des tests diagnostiques reste un défi majeur en Afghanistan et dans d'autres pays de la région en raison de leur prix élevé. Les gouvernements, les donateurs et les sociétés pharmaceutiques doivent agir maintenant pour garantir un approvisionnement abordable de ces tests et traitements essentiels contre la tuberculose, afin de sauver davantage de vies. »
Dans un pays comme l'Afghanistan, où les gens ont du mal à se procurer les produits alimentaires de base, et de quoi payer les frais de voyage et médicaux pour l'hôpital, pouvoir traiter les personnes atteintes de tuberculose résistante aux médicaments dans un délai de six mois, au lieu de deux ans comme c’est le cas avec les anciens schémas thérapeutiques, serait une bénédiction.
* Le traitement BPaLM de six mois est composé de bédaquiline (B), de prétomanide (Pa), de linézolide (L) et de moxifloxacine (M). Ce traitement ne conviendra donc pas aux personnes atteintes de tuberculose résistante à la bédaquiline, au linézolide, au prétomanide ou au delamanide. Dès lors, en parallèle de la mise en œuvre du régime BPaLM, tous les pays devraient d'urgence élargir l'accès aux tests de sensibilité aux médicaments utilisés dans le traitement de la TB-DR.
** nom modifié
© Jasňa Riegerová/MSF