MSF «secouée et consternée» par le pillage de ses locaux au Soudan
© MSF/Atsuhiko Ochiai
Soudan5 min
Médecins Sans Frontières (MSF) condamne le harcèlement inacceptable de son personnel ainsi que le pillage et l'occupation violents de ses locaux médicaux et de ses structures d'appui au Soudan. Le personnel et les patient·e·s sont régulièrement confrontés au traumatisme des groupes armés qui pénètrent dans les locaux de MSF et les pillent, et qui volent les médicaments, les fournitures et les véhicules. Ce mépris choquant des principes humanitaires et du droit international humanitaire entrave notre capacité à fournir des soins de santé aux populations à un moment où elles en ont désespérément besoin.
MSF, qui gère des projets médicaux dans dix États du Soudan, tente d'intensifier ses activités médicales depuis que des combats intenses ont éclaté entre les Forces armées soudanaises et les Forces de soutien rapide le 15 avril. Ces efforts ont été continuellement entravés par la violence, les incursions armées agressives, le pillage ou l'occupation armée de ses locaux, ainsi que par des problèmes administratifs et logistiques.
MSF appelle toutes les parties belligérantes à garantir la sécurité du personnel médical et des établissements de santé, à permettre le passage en toute sécurité des ambulances et des personnes à la recherche de soins, et à faciliter l'accès et la circulation rapide et sans entrave des travailleur·euse·s humanitaires, des organisations et de l’approvisionnement. Bien qu'un cessez-le-feu national ait été annoncé entre les parties belligérantes le 20 mai, il n’a pas toujours été respecté au niveau local par le passé.
Nous assistons à une violation des principes humanitaires et l'espace de travail des humanitaires se rétrécit à une échelle que j'ai rarement vue auparavant.
« Après le pillage de l'un de nos entrepôts médicaux à Khartoum, les réfrigérateurs ont été débranchés et les médicaments emportés. Toute la chaîne du froid a été détruite, de sorte que les médicaments sont périmés et ne peuvent plus être utilisés pour soigner qui que ce soit.
Nous sommes secoué·e·s et consterné·e·s par ces attaques déplorables. La population vit une situation désespérée et le besoin en soins de santé est critique, mais ces attaques rendent la tâche des professionnel·le·s de la santé beaucoup plus difficile. C'est insensé ».
Depuis le début du conflit, de nombreux incidents ont affecté les locaux de MSF au Soudan :
- Entre le 16 et le 20 mai, un entrepôt de MSF à Khartoum a été pillé et occupé. Des fournitures médicales, du carburant et des véhicules ont été volés. Les médicaments ont été abîmés.
- Entre le 17 et le 23 mai, le bureau de MSF à Zalingei, au Darfour central, a été pillé. L'hôpital universitaire de la ville a été pillé, le générateur détruit et le carburant donné par MSF pour faire fonctionner les générateurs et les ambulances a été volé.
- Le 19 mai, trois voitures de MSF ont été dérobées après que des hommes armés aient pénétré dans un bureau de MSF à Khartoum.
- Le 18 mai, une maison de MSF à Nyala, dans le sud du Darfour, a été pillée. MSF avait déjà été contrainte de suspendre ses activités médicales dans le sud du Darfour après que ses locaux et son entrepôt aient été violemment pillés à Nyala le 16 avril, et que deux véhicules aient été volés. L'entrepôt de MSF est toujours occupé par des combattants armés.
- Le 11 mai, un bureau de MSF à Khartoum a été pillé et deux véhicules ont été volés.
- Le 4 mai, un bureau de MSF à El Geneina a été pillé.
- Le 26 avril, l'hôpital universitaire d'El Geneina, où MSF gérait les départements de pédiatrie et de nutrition, a également été pillé et certaines parties de l'hôpital ont été endommagées ou détruites. L'hôpital demeure fermé à la suite de cette attaque.
Ces attaques ne se limitent pas uniquement à MSF et s'inscrivent dans une tendance plus large de mépris des deux parties belligérantes pour les vies civiles, les infrastructures et les installations de soins de santé. Au 22 mai, l'OMS avait recensé 38 attaques contre les structures de santé depuis le début du conflit. Les hôpitaux et les travailleurs de la santé sont protégés par le droit international humanitaire, mais des rapports font état d’occupations d'hôpitaux par des groupes armés, ce qui peut affaiblir leur protection et mettre en danger les patient·e·s, les travailleur·euse·s de la santé et les structures.
Cette déclaration intervient à un moment où le conflit a des conséquences désastreuses pour la population du Soudan. Les habitant·e·s de Khartoum, du Darfour et d'autres régions où les combats sont les plus intenses continuent de souffrir terriblement dans un contexte de violence permanente : les personnes sont blessées par balle, victimes de violences sexuelles, de coups de couteau et d’explosions. Les patient·e·s et le personnel craignent de se rendre dans les établissements de santé en raison des combats, des frappes aériennes et des autres actes de violence à proximité.
Dans tout le pays, la population est confrontée à des pénuries de nourriture et d'eau potable, ce qui oblige les gens à se déplacer pour tenter de répondre à leurs besoins fondamentaux. L'accès à l'aide humanitaire et aux soins de santé est vital, mais le système de santé soudanais est déjà confronté à un manque de fournitures essentielles.
Des problèmes administratifs et logistiques entravent également les activités médicales de MSF. Il est extrêmement difficile d'acheminer des fournitures d'une région à l'autre du Soudan. De même, bien que MSF ait pu faire entrer des équipes d'urgence au Soudan au cours des premières semaines du conflit, il est depuis lors difficile d'obtenir l'autorisation de se rendre sur les lieux des projets ou d'obtenir des visas pour du personnel supplémentaire.
MSF mène des projets médicaux dans les États d’Al Jazirah, d'El-Gedaref, de Kassala, de Khartoum, de la mer Rouge, du Nord, de l'Ouest, du Sud et du Centre du Darfour, et du Nil Bleu au Soudan. Il s'agit notamment de soigner les blessé·e·s de guerre à Khartoum et au Darfour Nord, de fournir des soins de santé et des services d'eau et d'assainissement aux réfugié·e·s et aux personnes déplacées dans les États d'Al-Gedaref et d'Al Jazirah, et de faire des dons de fournitures médicales et autres aux établissements de santé. En tant qu'organisation médicale neutre, indépendante et impartiale, MSF fournit des soins de santé aux personnes sur la base de leurs seuls besoins médicaux, en traitant ceux qui en ont le plus besoin, qu'ils soient d'un côté ou de l'autre du conflit.
© MSF/Atsuhiko Ochiai