Urgence climatique: nous n’avons pas d'autre choix que d'agir
© Pablo Garrigos/MSF
Urgence climatique6 min
Médecins Sans Frontières (MSF) s'engage à réduire d'au moins 50% les émissions de dioxyde de carbone dans ses projets humanitaires médicaux d'ici 2030 afin de préserver la santé future des patients et des communautés.
Reconnaissant sa contribution au problème mondial des émissions de CO2 et des dérèglements environnementaux causés par les humains, MSF Suisse s’engage, d'ici 2030, à réduire ses émissions d'au moins 50% par rapport aux niveaux de 2019. Avec cet objectif, nous entendons fixer une dynamique vers la décarbonisation. MSF s’aligne ainsi sur les objectifs de l'Accord de Paris sur le climat visant à limiter le réchauffement climatique en dessous de deux degrés. MSF Suisse, qui supervise les projets humanitaires médicaux dans 27 pays, et est le premier des cinq centres opérationnels de MSF à décider d’un objectif de réduction des émissions de dioxyde de carbone. Cette décision est consécutive à celle de l'ensemble du mouvement MSF, en 2020, de réduire l'impact environnemental de ses projets médicaux d'urgence par l'adoption d'un pacte environnemental.
Pas de santé humaine sans santé planétaire
Les dérèglements environnementaux causés par l'homme auront un impact considérable sur la santé et le bien-être des populations du monde entier. Si des mesures d'atténuation urgentes et à grande échelle ne sont pas adoptées dans l'ensemble de la société, la santé humaine sera de plus en plus affectée par les conséquences négatives de l'urgence climatique. Parmi ces conséquences figurent les phénomènes météorologiques extrêmes et la mutation des caractéristiques des maladies mortelles, telles que le paludisme, la dengue et le choléra. Les sécheresses, les inondations, les proliférations d'insectes et la modification des cycles des pluies peuvent mettre en péril la production alimentaire et les moyens de survie des populations.
L'heure tourne, nous constatons déjà comment les personnes à qui nous venons en aide, par exemple au Mozambique, au Honduras ou au Niger, ont été durement touchées par les chocs climatiques
« Nous allons réduire nos émissions carbones et revoir la manière dont nous menons nos opérations. Nous sommes en retard, nous devons faire maintenant ce qui aurait dû être fait il y a des années. Nous avons une obligation médicale et éthique envers nos patients et leur famille de ne pas leur nuire ou nuire à leur environnement du fait de nos pratiques » déclare Stephen Cornish, directeur général de MSF Suisse.
Un grand nombre des zones où MSF travaille aujourd'hui sont susceptibles de subir un changement climatique majeur. Les communautés qui y vivent sont confrontées à de multiples besoins sanitaires qui se cumulent en raison de la fréquence des épidémies, de l'insécurité alimentaire, des conflits et des déplacements. Avec l'accélération de cette urgence climatique, les besoins sanitaires dans des endroits comme la Somalie ou la région du Sahel vont prendre de l'ampleur et s'aggraver. Il est clair que cette crise touchera les personnes les plus vulnérables de la planète.
« C'est un grand pas en avant, un pas essentiel, déclare Christine Jamet, directrice des opérations MSF. En tant qu'organisation d'urgence, c'est une tâche considérable que de rendre nos opérations plus vertes, car notre priorité est toujours de fournir une assistance rapide dans certains des endroits les plus reculés du monde. Si nous ne savons pas encore exactement comment nous allons y parvenir, nous savons que nous devons le faire. C'est pourquoi nous avons fixé cet objectif et que nous nous engageons à rendre compte publiquement et en toute transparence des progrès accomplis pour l'atteindre. Nous n'avons tout simplement pas d'autre choix. »
Que fait MSF pour réduire son empreinte écologique ?
Nous venons d’adopter, peut-être un peu tard, un certain nombre de mesures. Nous avons par exemple commencé à mesurer nos émissions carbone et avons mis en place des initiatives visant à optimiser notre consommation énergétique et améliorer notre gestion des déchets. Nous devons à présent rapidement intensifier ces activités, nous efforcer de mesurer l'ampleur de notre empreinte écologique et définir une feuille de route définissant des mesures concrètes de réduction de nos émissions. À ce titre un partenariat est en cours avec une organisation externe spécialisée en la matière et qui nous accompagnera dans la recherche de solutions et de méthodologies permettant de traduire nos engagements en actions. Etant donné que nous connaissons l'origine de l'essentiel de nos émissions, nous voulons aujourd’hui nous assurer que des mesures concrètes soient prises. La bonne nouvelle est que des alternatives plus écologiques pour réduire la consommation d'énergie existent déjà – dans nos procédures internes, le choix des équipements, l’approvisionnement, l'utilisation d'énergies plus propres - qui offrent toutes de nombreux co-bénéfices pour les communautés que nous servons.
Qu'est-ce que cela signifie concrètement ?
Cela signifie que nous devons trouver des solutions concrètes et durables pour mener à bien notre mission médicale tout en réduisant la consommation d'énergie et en nous assurant que nos ressources sont utilisées de la manière la plus efficace et la plus respectueuse de l'environnement possible. Par exemple, nous avons analysé notre chaîne d'approvisionnement et nous savons qu'elle est un facteur clé de nos émissions. En changeant la nature, la manière et l'endroit où nous achetons le matériel permettant de faire fonctionner nos centres de santé et nos hôpitaux, ainsi que la manière dont nous l'expédions vers nos projets, nous allons avoir une approche différente. Nous savons de fait que nous devons recourir davantage au fret maritime qu'au fret aérien.
Sur le terrain, cela se traduit par une rationalisation de l'utilisation des transports, le recours à des technologies renouvelables comme les panneaux solaires en lieu et place des générateurs à carburant, une dépendance moins importante autour des articles médicaux à usage unique, une plus grande utilisation de produits moins polluants ou moins consommateurs d'énergie, une réduction dans la production de déchets et un accroissement des efforts pour améliorer les bonnes pratiques de traitement des déchets. Dans l'ensemble, il s'agit d'être plus attentif à la façon dont nous utilisons l'énergie en général : la somme des nombreux petits changements fera une différence considérable sur notre empreinte écologique globale.
Au siège, cela signifie réduire les voyages en avion au strict nécessaire, déménager nos bureaux dans un nouveau bâtiment économe en énergie et construit de manière durable, devenir plus responsables face à notre consommation d'énergie, même pour des choses qui semblent moins importantes comme l'utilisation et le stockage de données numériques.
Au vu de la taille de notre organisation et de la nature de nos activités, c'est une tâche considérable qui requiert un certain temps, la première étape étant d’identifier toutes les solutions possibles et de mettre à disposition les moyens nécessaires à leur mise en place.
© Pablo Garrigos/MSF