André, agent au service de sa communauté en Guinée

En 2012, MSF à traité 77 000 cas de paludisme dans la zone de Guéckédou, dont 23 000 ont été pris en charge par des agents de santé communautaire.

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En Guinée, MSF a mis en place un réseau d’agents communautaires de santé contre le paludisme. Un engagement de tous les instants pour ces volontaires soutenus par leur communauté.

André Millimouno est maçon de profession. Mais depuis septembre 2010, cet homme de 44 ans, enjoué et dynamique, a délaissé son métier pour être agent communautaire de santé. Lui et ses 47 collègues sont impliqués dans la prise en charge du paludisme au niveau communautaire dans la zone du projet de Médecins Sans Frontières (MSF) à Guéckédou, en Guinée forestière.
Ce matin-là, André est venu dans le village de Kat-Kama, qui se situe à 16 kilomètres du plus proche poste de santé. Sur la petite place centrale, sous un grand arbre, de nombreux villageois se sont rassemblés. Ils savent qu’André est venu pour les sensibiliser sur le paludisme et, surtout, pour tester et soigner ceux qui en sont malades. Sur son T-shirt, un message simple: «les Agents communautaires de santé s’engagent contre le paludisme».
André s’adresse à tous d’une voix forte qui couvre les cris des enfants excités par son arrivée. «Aujourd’hui, je veux vous parler de la moustiquaire et vous dire comment mieux l’utiliser pour vous protéger, vous et vos enfants, du paludisme», commence-t-il. Après 20 minutes de sensibilisation des villageois, André demande s’il y a des malades dans le village.

Un quart d’heure après le test, le diagnostic est confirmé

Une maman et ses deux enfants s’approchent, bientôt suivis par d’autres. Les deux filles de Delba Mara ont «le corps chaud», comme on dit ici. André prend leur température: le thermomètre marque 37,8°C pour l’une et 38,5°C pour l’autre. Il enfile alors ses gants en latex et prélève chez chacune une goutte de sang au bout du doigt, qu’il dépose sur une petite plaquette en plastique – un test de diagnostic rapide du paludisme. Un quart d’heure plus tard, le diagnostic est confirmé chez les deux fillettes. André donne alors à la maman des comprimés, de l’ASAQ, un médicament à base d’artémisinine, très efficace contre le paludisme. Il lui explique comment les donner aux enfants et l’importance de bien respecter les prises, une par jour pendant trois jours.
Après trois heures d’activité sur la place du village, André a diagnostiqué le paludisme et prescrit des médicaments pour huit autres personnes, en majorité des enfants de moins de cinq ans. André ne peut pas prendre en charge tous les cas de paludisme. Si le malade est un enfant de moins de deux mois, une femme enceinte ou s’il montre des signes de paludisme sévère, il le réfère dans le poste de santé le plus proche.
«Depuis que je suis devenu agent communautaire de santé, je ne peux presque plus travailler sur les chantiers», explique ce père de huit enfants. «Je suis très sollicité par les malades et cela me prend beaucoup de temps, mais c’est un engagement personnel.»
André, comme les autres agents communautaires de santé de la zone d’intervention de MSF à Guéckédou, est pris en charge par la communauté, qui le décharge de certains travaux aux champs et lui remet quelques dizaines de kilos de riz à chaque récolte. Sans l’implication de la communauté, ce genre d’activités ne pourrait pas être possible. «Quand un village décide de supporter et d’aider son agent communautaire, il décide de prendre une part active dans la santé et on a de meilleures chances de voir le projet maintenu une fois le départ de MSF», explique Philippe Latour, responsable terrain de MSF à Guéckédou.

Stratégies innovantes de lutte contre le paludisme

«Nous avons mis en place ce système des agents communautaires de santé pour pouvoir traiter les cas de paludisme simple au plus proche des populations», explique Jeannette Pedersen, une infirmière bernoise responsable du volet communautaire du projet MSF. «Ici, non seulement les villages sont souvent éloignés des structures de santé, mais les chemins sont mauvais et les gens ne disposent pas de moyens pour se déplacement.»
«Notre objectif est de voir ces stratégies reprises sur l’ensemble du territoire de la Guinée», explique Charles Gaudry, chef de mission de MSF en Guinée. «Nous avons bon espoir de réussir. Par exemple, le ministère de la Santé et ses partenaires mettent déjà en place un système d’agents communautaires de santé traitant le paludisme simple dans d’autres régions du pays, en s’appuyant sur l’expérience de MSF à Guéckédou. »
En 2012, les structures de santé soutenues par MSF ont traité 77 000 cas de paludisme dans la zone de Guéckédou, dont 23 000 ont été pris en charge par des agents de santé communautaire.