Par bateau et en voiture: le nouveau projet MSF amène des soins médicaux dans des endroits reculés
© Frederic Noy
Soudan du Sud3 min
Il est 8h du matin, la structure MSF à Akobo, au Sud-Soudan, est une ruche en pleine activité. Devant la tente logistique, le personnel charge soigneusement, à l'arrière d'un véhicule, des tables, des chaises, des nattes, des boîtes septiques, des médicaments et d’autres matériels.
A proximité, le coordinateur de projet avale une tasse de café tout en baragouinant dans une radio poussiéreuse. Des gilets de sauvetage non attachés posés sur leurs épaules, une équipe de cliniciens, d'infirmiers et d'agents de santé communautaire discutent de la stratégie de la journée.
Au moment où le soleil sud-soudanais parvient à percer la dernière couche de feuillage d'Akobo, la base est calme et l'équipe mobile MSF remonte déjà la rivière Pibor. Leur destination : un village isolé où il n'existe pas de services de santé.
Des millions de personnes déplacées
Depuis décembre 2013, en raison du conflit actuel au Soudan du Sud, des millions de personnes ont été, et continuent, d'être déplacées. A Akobo, les personnes qui fuient les zones de conflit voisines arrivent presque quotidiennement. Quelques-uns de nos patients nous racontent comment ils font le voyage de plusieurs jours à pied et ne marchent que de nuit, lorsque les combats s'arrêtent temporairement. Les femmes et les enfants constituent une grande partie des déplacés. Alors que certains parviennent à s'installer chez leurs proches, familles ou amis, d'autres n'ont pas d'autre choix que de rester dans l’enceinte de l'école primaire voisine, où ils ont peu d’accès à la nourriture ou à l'eau. Beaucoup sont traumatisés après avoir vu leurs maris, leurs pères ou leurs frères tués, au milieu de cette insécurité.
En raison du conflit en cours et des déplacements qui en résultent, les besoins médicaux et humanitaires sont énormes dans la région. C'est dans ce contexte que MSF a lancé son nouveau projet au Soudan du Sud. Répondant aux besoins des communautés d'accueil et des populations déplacées, MSF gère actuellement des cliniques mobiles qui se déplacent par bateau ou en voiture pour fournir des soins de santé de base là où ils sont les plus nécessaires.
Des villages quasiment privés de soins
« Akobo et les villages des environs sont quasiment privés de soins de santé fiables et de qualité, explique Raphael Veicht, chef de mission au Soudan du Sud. Comme les structures médicales de la région ont été abandonnées ou réaménagées pour d'autres usages, cette population déjà très vulnérable n'a nulle part où aller pour obtenir des soins de base. »
L'équipe médicale, qui est partie tôt ce matin, est maintenant arrivée à Kier, un village situé à une heure de bateau. Comme d'habitude, elle s’installe à l'ombre de quelques arbres bien positionnés. En quelques minutes, l'endroit se transforme en une clinique de soins de santé de base avec une salle d'attente et des tentes utilisées comme espaces de consultation individuelle. Les patients arrivent et s'assoient tranquillement sur des nattes, prêts à se faire prendre leurs signes vitaux, tandis que les infirmières auxiliaires préparent les médicaments prescrits par les cliniciens. Après seulement deux heures et demie, près de 30 patients ont déjà été examinés.
Entre 50 et 60 patients par jour
« Nous recevons généralement entre 50 et 60 patients par jour, détaille Tut Kuang Ler, clinicien MSF. Aujourd’hui, six d’entre eux ont été testés positifs pour le paludisme et cinq jeunes enfants avaient la diarrhée. Nous avons aussi eu un cas d’infection fongique. »
Avec les cliniques mobiles qui se déplacent actuellement dans sept localités différentes des anciens comtés d'Akobo et d'Ulang, les équipes médicales MSF traitent plus de 2 000 patients par mois. Entre-temps, l’organisation a démarré la construction d’une structure plus permanente à Kier, un établissement de santé primaire qui sera en mesure d'offrir des soins plus avancés. Mais pour l'instant, les équipes restent mobiles.
A 2h30 de l'après-midi, les derniers patients sont passés par la clinique. Tut Kuang Ler s'arrête et jette un dernier coup d'œil en direction du champ, à côté, pour de potentielles arrivées tardives. Aucune. « Il est temps de remballer et de rentrer à Akobo », conclut-il.
© Frederic Noy