Nord-Kivu: des dizaines de milliers de personnes déplacées suite à un nouveau cycle de violences

Des familles font la queue pour recevoir de l'eau potable distribuée par MSF.

République démocratique du Congo (RDC)4 min

Les violents affrontements entre le groupe armé M23 et l’armée congolaise (FARDC), au cours des deux dernières semaines, dans les territoires de Rutshuru et Nyiragongo, au Nord-Kivu, ont poussé des dizaines de milliers de personnes à quitter précipitamment leur maison. Ces récents mouvements de population viennent exacerber une situation déjà précaire pour les personnes déplacées dans ces deux territoires.

Avant les derniers affrontements à Nyiragongo, le territoire accueillait déjà de nombreuses personnes déplacées à la suite de l’éruption du volcan en mai 2021. À Rutshuru, des combats entre le M23 et les FARDC fin mars 2022 avaient déjà forcé plus de 50 000 personnes à fuir leur village, dont environ 25 000 s’étaient réfugiées en Ouganda. La plupart ne sont toujours pas rentrés chez elles. 

Au total, depuis fin mars, on estime que 117 000 personnes ont dû trouver refuge dans des écoles, des églises ou des familles d’accueil à cause du regain de violence dans cette région du Nord-Kivu, en laissant souvent tout derrière elles.

Des conditions de vie très précaires

« Nous dormons à 18 ménages, entassés dans une salle de classe », raconte Noélla, qui vit avec deux de ses enfants dans l’école du village de Kinoni, dans le territoire de Rutshuru, avec près de 350 autres familles. « Nous n’avons plus accès à nos champs. Nous mangeons ce que nous trouvons mais souvent c’est à peine une fois par jour. » 

Début mai, MSF a mis en place une clinique mobile dans le village de Kinoni, à proximité de l’école où Noélla et de nombreuses familles vivent. Depuis les consultations ne désemplissent pas. « Nous avons effectué plus de 2200 consultations depuis que nous avons commencé la clinique mobile, ce qui représente en moyenne 120 patients par jour. », explique Foura Sassou Madi, chef de mission MSF en République démocratique du Congo (RDC).

Les maladies principales que nous observons sont le paludisme, les infections respiratoires et la diarrhée.

Foura Sassou Madi, chef de mission MSF en République démocratique du Congo

MSF a aussi organisé une distribution de biens de premières nécessités, comprenant des bâches, des seaux, des ustensiles de cuisine et du savon, pour les familles déplacées vivant à Kinoni. Nos équipes ont également construit des douches et des latrines pour améliorer les conditions de vie et d’hygiène dans le village. 

« Beaucoup de personnes nous disent qu’elles ont des difficultés pour trouver de la nourriture », explique Foura Sassou Madi. « Certaines personnes sont déplacées depuis plus de deux mois. Il est nécessaire d’organiser rapidement des distributions alimentaires pour les personnes déplacées dans le territoire de Rutshuru pour éviter une détérioration de l’état de santé de ces populations. »

Renforcer l’accès aux soins et à l’eau potable : une priorité

Mi-avril, MSF a commencé à soutenir les centres de santé des localités de Mungo et de Rutsiro, dans le territoire de Rutshuru afin de faciliter l’accès à des soins gratuits pour la population, tant hôte que déplacée. « Aux mois d'avril et mai, nous avons reçu plus 1 100 personnes déplacées au centre de santé. Certains marchent jusqu’à 5 kilomètres pour venir ici », explique Ezéchiel Biriko, infirmier titulaire du centre de santé de Rutsiro. Suite aux récents déplacements de population, MSF prévoit de renforcer sa réponse à Rutsiro, où on recense environ 6 500 personnes déplacées, avec des activités liées à l’eau et assainissement et un support additionnel au centre de santé.

Renforcer l’accès aux soins et à l’eau potable est aussi urgent à Munigi, dans le territoire de Nyiragongo, où 16 000 personnes se sont mises à l’abri selon l’Organisation internationale des migrations. MSF appuie la gratuité des soins pour toute la population au centre de santé de Munigi et a mis en place un système de référence pour les cas urgents vers un hôpital de Goma. 

MSF apporte également chaque jour plus de 100m3 d’eau potable au centre de santé et sur deux sites qui accueillent de nombreux déplacés à Munigi.

Permettre à la population d’avoir accès à l’eau potable est crucial pour limiter les risques de maladies hydriques, comme le choléra, qui est endémique dans la région.

Abdou Musengetsi Katumwa, coordinateur médical adjoint pour MSF à Goma

Les populations civiles sont les premières victimes des conflits armés qui affectent la province du Nord-Kivu depuis plus de 20 ans. MSF est présente dans le territoire de Rutshuru depuis 2005 et travaille à l’heure actuelle avec les hôpitaux de Rutshuru, Bwiza, Kibirizi et Bambu ainsi qu’une dizaine de centres de santé. À Goma, nos équipes sont impliquées dans la lutte contre le choléra depuis 2008.