Nord-Kivu: plus d’un million de personnes déplacées par les combats, des besoins immenses et non-couverts
© MSF
République démocratique du Congo (RDC)3 min
Début mars 2023, des affrontements autour de Kibirizi, dans le Nord-Kivu, ont entraîné la fuite de 150 000 personnes. Depuis mars 2022, la reprise du conflit impliquant le M23, l’armée congolaise et différents groupes armés entrainent des milliers de personnes à la fuite. Médecins Sans Frontières (MSF) fournit une assistance dans les camps, où des besoins immenses subsistent. Nous avons recueilli les témoignages de ces personnes déplacées et du personnel sur place.
Nsabimana Ngurinze, déplacé avant perdu contact avec sa famille
« Nous avons marché à pied jusqu'à Kibirizi. Les enfants étaient fatigués, ils étaient malades. Ma femme était enceinte, et à cause de la fatigue, elle a fait une fausse couche. La guerre nous a ensuite rattrapés à Kibirizi. Quand on a entendu les balles dans la ville, on a fui. Ma femme et mes enfants sont partis dans une direction, et moi dans l’autre. Je ne sais pas où ils sont. » Le père de famille a trouvé refuge dans une église de la ville de Kanyabayonga, où les équipes MSF soutiennent un centre de santé.
Docteur Padoue Kabamba Nawej, référent médical, MSF
« À chaque fois qu'on consulte les malades, on essaie de voir ce qu'il se passe du point de vue du moral, je pense que la population est un peu désespérée car ils ne sont plus dans leur logis, ils ne sont plus dans leurs maisons, ils ne font plus les champs, donc ils manquent de tout : ils manquent d'abris, ils manquent de nourriture, ils manquaient aussi de soins. Tout ça, ça a un impact sur le mental, je pense que la population est vraiment affectée. Nous savons que ça brûle à l'intérieur, toutes ces atrocités, ça affecte du point de vue mental et physique. Ça fait plus d'une année qu'ils sont en train de fuir, ils laissent les champs, quelquefois ils laissent les enfants, certains ne savent même pas où se trouvent leurs enfants jusqu'à aujourd'hui. »
Dr Prince Djuma Safari, coordinateur médical d’urgence, MSF
« On voit qu'il y a une disproportion entre l'aide humanitaire et les besoins dans les camps. Par exemple, le camp de Lushagala, c'est un camp de plus de 73 000 personnes. Dans ce camp, on a jusqu'à présent 60m3 d'eau. Donc les besoins sont énormes, si tu fais le ratio pour cette population, c'est moins d'un litre d'eau par personne [par jour]. »
Augmentation alarmante des cas de rougeole.
Agnes Otema, jeune mère déplacée
« Lorsque vous arrivez dans le camp de Bulengo, vous allez trouver beaucoup d'enfants qui sont à l'hôpital, il y a deux tentes avec des enfants [souffrant] de rougeole. Mon enfant était hospitalisé dans le camp de Bulengo. Alors on l'a traité là-bas, malheureusement, il risquait de mourir, alors on m'a transférée ici [à l’hôpital de Kyeshero] parce que l’enfant n’arrivait pas à respirer. »
MSF soutient les personnes déplacées dans les camps autour de Goma et dans le territoire de Lubero en fournissant des soins médicaux et en améliorant l’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement.
Face à la catastrophe humanitaire en cours au Nord-Kivu, Médecins Sans Frontières appelle la communauté internationale et les autorités à urgemment accroître leurs efforts pour répondre aux besoins de la population. Au cours des 12 derniers mois, plus d’un million de personnes ont fui les combats liés à la résurgence du groupe armé M23, provoquant « une crise dans la crise » dans l’est de la RDC. Les personnes déplacées, mais aussi des communautés entières isolées par les affrontements, font face à une situation sanitaire critique, avec notamment une multiplication des cas de rougeole et de choléra dans certains sites accueillant des déplacés. Dans ce contexte, la réponse est aujourd’hui largement insuffisante au Nord-Kivu.
© MSF