La ville mexicaine de Nuevo Laredo n'est pas un lieu sûr pour les demandeurs d'asile
© Juan Carlos Tomasi
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Une décision américano-mexicaine qui place les demandeurs d'asile dans une situation extrêmement dangereuse
MSF dénonce fermement la décision des gouvernements du Mexique et des États-Unis d'élargir leur politique de demande d'asile aux États-Unis qui oblige les demandeurs d'asile d'attendre la fin des procédures judiciaires dans des régions violentes du Mexique, ce qui les expose à un danger extrême.
Les deux pays ont convenu d'étendre la politique «Rester au Mexique » (officiellement connue sous le nom de Protocoles de protection des migrants) pour inclure Nuevo Laredo, une ville frontalière de l'État de Tamaulipas contrôlée par des groupes criminels. Les demandeurs d'asile à Nuevo Laredo sont constamment exposés aux vols, aux agressions, à l'extorsion, aux enlèvements et aux homicides.
Cette politique confine les personnes vulnérables dans des zones contrôlées par des organisations criminelles, qui considèrent les migrants comme de la marchandise et une source de revenus.
Renvoyer au Mexique des personnes qui demandent l'asile et les contraindre à rester à Nuevo Laredo est une politique inacceptable
Selon les données des patients de MSF recueillies entre janvier et mai cette année, plus de 45 % des 378 patients traités par MSF à Nuevo Laredo ont vécu au moins un épisode de violence dans la ville, alors qu'ils attendaient de franchir la frontière des États-Unis. Sur les 378 patients traités dans le cadre des programmes de santé mentale de MSF en 2019, 45 personnes (12 %) avaient été enlevées, dont 26 au cours des sept jours précédant leur consultation en santé mentale.
«La majorité de nos patients ne sortent pas dans la rue en raison du risque imminent d'enlèvement», déclare Maria Hernandez. «Les demandeurs d'asile que nous traitons et conseillons à Nuevo Laredo viennent de nombreux pays, notamment de Cuba, de la République démocratique du Congo, du Cameroun et du Mexique. Cependant, il ne fait aucun doute que ce sont les ressortissants d'Amérique centrale qui risquent le plus d'être kidnappés, et c'est cette même population qui sera renvoyée en grand nombre au Mexique en vertu de la politique “Rester au Mexique”».
Nuevo Laredo ne peut pas devenir une ville d'accueil pour les personnes en quête d'asile aux États-Unis et qui ont besoin de protection, a averti MSF.
Le Mexique ne peut être considéré comme un pays sûr pour les personnes qui fuient la violence, et Tamaulipas en est un bon exemple
Même le système d'avertissements aux voyageurs du département d’État américain classe l’État de Tamaulipas dans la catégorie 4 — qui correspond au niveau de risques le plus élevé, souvent utilisé pour les pays en guerre — et avertit les citoyens américains d’y éviter tout voyage en raison du taux élevé de criminalité et d'enlèvements.
Selon des témoignages recueillis par MSF, des groupes criminels ciblent les migrants et les demandeurs d'asile dès leur arrivée à Nuevo Laredo. «Ils sont kidnappés aux terminaux de bus», explique Maria Hernandez. «Ils sont détenus dans des maisons où ils sont extorqués, battus et agressés. Certains sont menacés de mort, détenus pendant de longues périodes pour travaux forcés, exploités sexuellement ou recrutés de force par des organisations criminelles.»
La semaine dernière, MSF a dénoncé les récentes arrestations massives de migrants menées par les autorités mexicaines à la frontière sud du pays avec le Guatemala. Ce type d'opérations visant les migrants qui empruntent des routes clandestines les exposent à davantage de dangers — notamment aux gangs criminels impliqués dans la traite des êtres humains — et les empêchent d'accéder aux services de santé.
MSF exhorte les autorités mexicaines et américaines à placer la protection des êtres humains et l'assistance humanitaire au centre de leurs politiques migratoires. Les décisions que ces administrations ont prises pour faire face à cette crise ont des conséquences humanitaires dévastatrices. Elles aggravent les souffrances de milliers de personnes qui fuient leur pays et mettent des vies en danger.
© Juan Carlos Tomasi