Violences sexuelles à Acapulco: «briser les barrières et pouvoir dire : assez !»

Acapulco, 13 novembre 2018

Mexique4 min

Marbella vit en périphérie d'Acapulco, au Mexique. Elle a survécu à plusieurs actes de violence sexuelle. Elle a suivi une thérapie de plusieurs mois avec Nadia Rivera, psychologue de MSF, qui l'a aidée à briser le cercle vicieux de la violence et à reprendre sa vie en main. Auparavant, comme la plupart des victimes, elle a dû faire face à de nombreux obstacles.

À Acapulco, où le taux d'homicides est l’un des plus élevé au monde, la violence est protéiforme. Dans de nombreux quartiers de la ville, meurtres, enlèvements, extorsions, fusillades, viols et agressions sexuelles sont quotidiens. La normalisation de la violence est un problème qui touche malheureusement tous les domaines de la vie, tant publique que privée.

MSF offre des soins psychosociaux, mentaux et médicaux aux victimes de violence en général et plus particulièrement aux survivants de violences sexuelles, l'un des groupes les plus vulnérables.

Lorsque nous avons lancé ce projet, nous nous sommes rendu compte que la violence était profondément enracinée et normalisée parmi les habitants d'Acapulco. L'impact sur la santé mentale de la population était évident ; les gens s'étaient habitués à vivre dans la peur. En outre, la violence sexuelle est devenue un problème social et culturel commun.

Nadia Rivera, psychologue MSF travaillant dans l'État de Guerrero
Acapulco, 13 novembre 2018

Marbella a subi des violences sexuelles à plusieurs reprises à différents âges, enfant, adolescent et plus récemment. Elle milite désormais auprès d'autres femmes pour que la violence sexuelle, très répandue à Acapulco ne soit pas normalisée. 13.11.2018

© Christina Simons/MSF

Les femmes, principales victimes des violences sexuelles

Les femmes continuent d'être le groupe le plus touché par les violences sexuelles : 85 % des cas traités par MSF sont des femmes et des filles. « Ma famille m'a dit que c'était normal, que c'était arrivé dans toutes les relations et que je devais le supporter. Aux yeux des autres, c'est moi qui étais inhabituelle » raconte Marbella, une femme de 22 ans qui a été victime de violence sexuelle de la part de son mari.

La recrudescence des violences sexuelles est un problème de santé publique au Mexique, qui doit être traitée comme une urgence médicale. À Acapulco, MSF s'efforce de garantir des services de soutien médical, psychologique et social à toutes les victimes de violences sexuelles, ainsi que le droit d'accès à la santé pour tous.

En outre, les psychologues sociaux et les promoteurs de la santé de MSF ont évalué les besoins de la population et mené des activités communautaires, notamment pour prévenir et détecter les cas de violence sexuelle.

Quand j'ai cherché de l'aide, ils m'ont dit que c'était ma faute parce que je vivais avec la violence, puis j'ai commencé à aller aux discussions des promoteurs de MSF où j'ai réalisé que personne n'avait à supporter une situation comme celle-là.

Marbella, survivante de violences sexuelles

Offrir une aide cruciale

« L'aide offerte par MSF est venue au moment où j'en avais le plus besoin. J'avais perdu espoir, j'avais honte et je pensais que ma famille avait raison, c'est pourquoi j'ai cessé de chercher de l'aide. Il était donc très important de trouver quelqu'un pour m'écouter et m'aider » dit Marbella. 

Les traumatismes émotionnelles causés par une agression sexuelle sont profonds et les conséquences physiques peuvent être graves. Il est essentiel de recevoir immédiatement des soins médicaux après l'agression sexuelle. Un traitement dans les 72 remières heures peut suffire à prévenir le VIH et d'autres infections sexuellement transmissibles, ainsi que les grossesses non désirées. Des soins immédiats aux survivantes doivent donc être garantis et fournis en temps opportun.

Acapulco, 13 novembre 2018

Marbella a terminé son traitement avec Nadia, la psychologue de MSF, il y a seulement quelques semaines. Elle milite maintenant pour encourager d'autres femmes à quitter les hommes qui les maltraitent.

© Christina Simons/MSF

L'un des grands défis du projet a été de gagner la confiance des gens et de les amener à faire suffisamment confiance aux professionnels de la santé pour qu'ils nous racontent leurs expériences, comme le fait d'avoir été victime d'abus sexuels, surtout lorsqu'ils étaient à la maison.

Nadia Rivera, psychologue de MSF travaillant dans l'État de Guerrero.

Comme les conditions de sécurité médiocres rendent l'accès aux centres de santé difficile pour les résidents et les professionnels de la santé, MSF a offert des services de santé et des soins médicaux, psychologiques et sociaux complets aux victimes de violences sexuelles dans deux unités hospitalières de la ville, grâce à une collaboration avec le Secrétaire d'État à la santé du Guerrero. Ainsi, en 2018, MSF a aidé 58 survivants de violences sexuelles à Acapulco : 47 étaient des femmes et 40 % des victimes étaient mineures.

« J'ai approché les autorités sans recevoir de réponse. J'ai frappé aux portes et ils m'ont rejeté. J'ai dû faire face à de nombreux obstacles et vécu avec la violence de bien des façons. En tant que femme, il n'est pas facile d'élever la voix, mais n'ayez pas peur, il y a toujours de bonnes personnes qui vous aident. Il suffit de briser les barrières pour pouvoir dire : assez, c'est assez » conclut Marbella.