Tchad : pénuries alimentaires récurrentes dans les camps de réfugié·e·s soudanais·e·s

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Soudan3 min

Plus de 500 000 personnes se sont installé·e·s dans l’est du Tchad depuis le début de la guerre au Soudan, en avril 2023. Sur place, elles peinent à accéder à une nourriture adéquate et en quantité suffisante. Les équipes MSF s’inquiètent de l'impact de ces privations alimentaires sur l’état de santé des nombreux·euses enfants réfugié·e·s dans cette région.

Les réfugié·e·s sont réparti·e·s dans de nombreux camps, situés dans la zone frontalière du Soudan, particulièrement entre les villes d’Abéché et d’Adré. Le camp d’Aboutengue abrite par exemple quelque 44 500 réfugié·e·s, dont une majorité de femmes et d’enfants, confronté·e·s à une forte réduction des rations alimentaires et à de mauvaises conditions de vie, en raison du manque d’abris adéquats.

Notre situation est dramatique. Au début, on nous donnait suffisamment de nourriture, mais les rations ont diminué. Récemment, nous n’avons reçu que du sorgho et de l’huile, qui sont difficiles à cuisiner seuls. Nous n’avons pas assez pour subvenir aux besoins de notre famille, en particulier à ceux de nos enfants.

Jimiya, réfugiée soudanaise arrivée à Aboutengue avec sa famille en juillet 2023.

Depuis février 2024, les rations alimentaires ont progressivement diminué. L’incertitude quant au financement de l’aide humanitaire a entraîné d’importantes perturbations et retards d’approvisionnement.

« Nous prêtons une attention particulière à ces pénuries récurrentes dans les distributions de nourriture, » explique Danielle Borges, coordinateur·trice d’urgence pour MSF dans l’est du Tchad. « Dans le camp d’Aboutengue, MSF traite chaque mois des centaines d’enfants souffrant de malnutrition aiguë modérée ou sévère. Nous craignons que la situation ne s’aggrave si les pénuries alimentaires persistent. »

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Portrait de Jimiya, réfugiée soudanaise qui vit désormais dans l'est du Tchad avec son mari et leur huit enfants. 2024.

© Thibault Fendler/MSF

Ce camp est situé dans une zone reculée et les réfugié·e·s ont difficilement accès aux moyens de subsistance. Cela les rend encore plus dépendant·e·s de l'aide humanitaire. Sans nourriture ni soutien financier suffisant, les femmes doivent parcourir de longues distances à pied dans les bois environnants pour ramasser du bois de chauffage, ce qui est l’un des rares moyens de gagner de l’argent.

«Parfois, lorsque nous sommes dans les bois, des personnes nous menacent en disant que nous navons pas le droit de ramasser du bois,» déplore Aziza, réfugiée soudanaise, mère de sept enfants, qui vit dans le camp depuis juillet 2023. «Certaines dentre nous ont même été battues.»

Un fagot de branches sèches se vend entre 1 et 3 euros sur les marchés informels qui ont surgi autour du camp. «Cette activité est devenue vitale. Malheureusement, les agressions dans la forêt ne sont pas rares,» explique Atsuhiko Ochiai, coordinateur·trice de projet MSF.

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Des femmes collectent de l'eau restante au point de distribution dans le camp d'Alacha, à l'est du Tchad. 2024.

© uan Carlos Tomasi/MSF

À Metché, à deux heures d’Adré, la situation est tout aussi alarmante. De nombreux·euses réfugié·e·s survivent désormais avec un seul repas par jour. Si des distributions de nourriture ont eu lieu ces derniers mois à Metché et dans les camps voisins d’Alacha et d’Arkoum, les apports nutritionnels contenus dans les portions octroyées à chaque réfugié·e sont faibles.

«Le sentiment dominant est que cette crise est négligée par les principaux donateurs,» explique Danielle Borges. «Sans un soutien immédiat et conséquent, nous risquons d’être confronté·e·s à une détérioration catastrophique de la situation humanitaire dans cette région.»