Protéger le climat, c'est protéger la santé

Un homme marche dans le camp innondé de Rann au Nigeria.

Urgence climatique5 min

La fonte des glaciers, même dans les Alpes suisses, illustre bien que la crise climatique existe depuis longtemps. Le changement climatique mondial n'affecte pas seulement l'environnement, l'économie et la société, il présente également un risque considérable pour la santé. Les populations des pays où Médecins Sans Frontières travaille sont particulièrement impactées.

La Suisse est plus touchée que la moyenne par le changement climatique. Au fil des ans, le climat deviendra plus sec, plus chaud, moins enneigé, et les précipitations augmenteront. C'est ce que décrit le dernier rapport de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) sur le changement climatique en Suisse. Les habitants ont accès à des structures de santé fonctionnelles et à un système de caisse maladie, mais ce n’est pas forcément le cas des personnes les plus vulnérables dans les pays du Sud. La crise climatique représente une menace de plus pour leur survie. 

Des inondations, des sécheresses et des tempêtes de plus en plus intenses et fréquentes affectent la sécurité alimentaire, l'accès à l'eau potable et aux soins. Les équipes MSF répondent déjà à de nombreuses crises humanitaires dues à des conflits, des déplacements de populations, des catastrophes naturelles et des épidémies. Nous sommes témoins des conséquences de plus en plus fréquentes que le changement climatique et la détérioration de l’environnement peuvent avoir sur les personnes dans le besoin, par exemple au Mozambique, au Soudan du Sud ou plus récemment à Madagascar.

La crise climatique amplifie les crises humanitaires

Les équipes MSF sont des humanitaires, pas des experts en climatologie. Mais après des années à constater comment le changement climatique exacerbe les crises sanitaires et humanitaires dans nos différents contextes d’intervention, nous nous sentons obligés de nous exprimer sur ce dont nous sommes témoins.

Carol Devine, responsable climat et environnement à MSF

Par exemple, plus de deux décennies de conflit, d'instabilité politique et de conditions climatiques extrêmes en Somalie ont conduit à l'une des crises humanitaires les plus longues au monde. Des inondations intenses et fréquentes, des sécheresses et des invasions de criquets ont dégradé les moyens de subsistance et nui à la sécurité alimentaire. Cela a accru les tensions existantes et la concurrence pour des ressources qui se rarifient. Les effets du changement climatique sont particulièrement visibles sous la forme de la malnutrition chez les enfants. Si le réchauffement climatique se déroule conformément aux projections, MSF alerte sur le fait que la diminution des récoltes et la qualité nutritionnelle de certaines céréales pourraient augmenter le risque de malnutrition. Les jeunes enfants sont souvent les premiers à en souffrir.

Nouvelles conditions de vie, nouveaux agents pathogènes

Il est aussi très probable que les changements climatiques continueront à modifier nombre de pathologies et que de nouvelles maladies apparaîtront.

Sibylle Berger, répresentante MSF en Suisse

Des maladies telles que la dengue, le paludisme et le chikungunya se propagent beaucoup plus rapidement lorsque les températures sont uniformément plus élevées. La bactérie du choléra peut également survivre plus longtemps dans des eaux plus chaudes.

« Ainsi les équipes MSF travaillent dans des contextes où la hausse des températures peut amener à une augmentation des maladies infectieuses et des épidémies. Pour les populations, ceci vient s’ajouter à d’autres causes de vulnérabilité comme les conflits ou les déplacements forcés », explique Sibylle Berger, répresentante MSF en Suisse. La Somalie, par exemple, a connu une épidémie massive de choléra en 2017, suivie par un épisode de malnutrition sévère. En 2019, les équipes MSF au Honduras ont pris en charge les patients victimes de la plus importante épidémie de dengue depuis 50 ans. En République démocratique du Congo (RDC), plus de 80 000 nouveaux cas de paludisme sont à craindre pour les prochaines années, car les moustiques qui transmettent la maladie se propagent à des altitudes plus élevées.

Par ailleurs, les zoonoses, c'est-à-dire les virus qui peuvent passer de l'animal à l'homme et vice versa, seront plus fréquentes lorsque les écosystèmes s'amenuiseront. On peut citer comme exemples la multiplication des épidémies d'Ebola en Afrique de l'Ouest et en RDC qui s’étalent dans la durée ou la propagation des moustiques tigres sur tous les continents.  

Prendre la route pour fuir la crise climatique 

La crise climatique vient aggraver ou s’ajouter aux causes (conflits, conditions économiques) qui poussent davantage de gens à fuir leur foyer. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), cela représente environ 24,9 millions de personnes chaque année. Les risques sanitaires associés à ces mouvements vont de la malnutrition aux épidémies – rougeole, méningite, infections respiratoires aiguës –, à des maladies sexuellement transmissibles ou mentales, toutes ces pathologies étant particulièrement fréquentes dans les endroits où de nombreux individus vivent ensemble dans un espace restreint. 

Les phénomènes météorologiques extrêmes, la dégradation de l'environnement et l'insécurité alimentaire due aux sécheresses et aux inondations augmentent le stress mental et physique des personnes vivant dans les zones particulièrement vulnérables. « Nous constatons, par exemple, que la sécheresse extrême qui sévit en Amérique centrale contribue à augmenter leur nombre de maladies rénales graves, à cause de déshydratation importante et d’une température corporelle élevée », précise Sibylle Berger, répresentante MSF en Suisse.  

Protéger le climat, c'est protéger la santé

Les effets directs et indirects du changement climatique sur la santé des personnes sont énormes et, comme c'est souvent le cas, ils frappent particulièrement les groupes déjà vulnérables.  

Ce que nous pouvons faire, c'est déployer un effort collectif pour atténuer l'impact sur la santé des populations. Nous pouvons par exemple, apporter une aide humanitaire proactive, renforcer les systèmes de santé nationaux et investir dans la recherche médicale.

Sibylle Berger, répresentante MSF en Suisse